Trois questions à…

Olivier Picard*

Publié le 19/05/2022
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Le Quotidien du pharmacien.- Beaucoup de pharmaciens ont du mal à trouver des adjoints. Comment expliquez-vous cette situation ?

Olivier Picard.- Il est de plus en plus difficile pour les officines britanniques de trouver des pharmaciens salariés, car ils choisissent souvent d’autres voies, dont les cabinets médicaux. Les médecins de groupe engagent volontiers des pharmaciens, non seulement pour des activités liées aux médicaments, mais aussi pour leur confier des actes de soin, comme ils le font avec des infirmiers ou même des ambulanciers, ce qui leur permet de limiter au minimum leur « temps médical » et donc de voir plus de patients. En effet, les pharmaciens « coûtent » moins cher que les médecins… Mais gagnent plus en cabinet médical qu’en officine.

Cette situation peut mettre les adjoints en position de force, mais qu’implique-t-elle pour les titulaires ?

Les officines en paient les conséquences : par manque d’adjoints disponibles, les pharmaciens intérimaires ou locums ont des exigences très élevées, qui peuvent dépasser les 40 ou 50 livres de l’heure, voire bien plus à Londres, sommes que beaucoup d’officines ne peuvent leur offrir. Certains locums sont de véritables « mercenaires » avec un statut d’indépendant, et changent de pharmacie plusieurs fois par mois ou même par semaine, ne répondant systématiquement qu’aux plus offrants… À l’inverse heureusement, de nombreux pharmaciens employés travaillent de manière régulière dans la même pharmacie, avec une couverture sociale et des avantages liés à leur fidélité. Mais d’un autre côté, il faut dire que les salaires des pharmaciens sont relativement bas, une moyenne mensuelle nette avoisinant les 3 000 livres, soit 3 300 euros. D’ailleurs, la pharmacie britannique est loin d’être une mine d’or car, ici, les seuls à gagner vraiment bien leur vie dans la santé sont les médecins.

Comment les adjoints jugent-ils leur vie professionnelle ?

Tous les adjoints français que je connais, dans mes pharmacies ou ailleurs, s’accordent pour juger l’exercice outre-Manche plus varié et plus intéressant qu’en France, et le nombre de leurs missions ne cesse de progresser. Même si elles appartiennent à des chaînes, de nombreuses officines sont en fait des petites structures dans lesquelles le pharmacien manager dispose de larges responsabilités, presque comme un titulaire. Et de toute façon, il est devenu impossible de créer des officines, si bien que ce mode d’exercice est appelé à se développer encore, que les pharmaciens le souhaitent ou non.

* Pharmacien français installé à Reading, dans le Berkshire, un comté situé au sud-ouest de Londres, Olivier Picard est propriétaire de 4 officines. Il siège par ailleurs au comité directeur de l’association des pharmaciens britanniques indépendants, la NPA.

Propos recueillis par DDB

Source : Le Quotidien du Pharmacien