Les télomères sont les parties terminales des chromosomes, ils protègent les extrémités des brins d’ADN et le patrimoine génétique situé au cœur des cellules. Lors de chaque division cellulaire, les télomères protecteurs s’usent et les cellules perdent une partie de leur capacité télomérique.
Au bout d'un certain nombre de réplications, les télomères deviennent trop courts et atteignent une taille critique qui bloque définitivement la prolifération cellulaire : les cellules entrent en phase de sénescence et stoppent leur croissance. « Cet état instable favorise l’apparition de tumeurs ou de cancers, explique le Pr Athanase Benetos, du CHRU de Nancy et professeur à l’Inserm. On sait également que des télomères courts augmentent le risque de maladies liées au vieillissement, comme les maladies cardiovasculaires, articulaires et neurodégénératives. »
Les deux dernières années ont permis de comprendre le rôle de la longueur des télomères sur le vieillissement et la longévité via leur influence sur la sénescence réplicative et la capacité de réparation tissulaire. L'intégration de cette découverte dans un ensemble de données cliniques, biologiques et sociales permettrait de mieux individualiser les stratégies de prévention.
Pour confirmer que le raccourcissement des télomères apparaît avant la maladie et que les télomères courts sont un facteur de risque, le Pr Benetos et son équipe ont étudié le pronostic de l’athérosclérose selon l’évolution de la longueur des télomères au cours du temps. Il est ainsi apparu que les patients qui avaient des télomères courts à l’inclusion présentaient une athérosclérose plus précoce et plus sévère que ceux à télomères longs, alors que les changements de longueur avaient peu varié chez l'ensemble des patients à l'issue du suivi. « Ces résultats confirment que la longueur des télomères est bien un bio déterminant dans l’apparition de la maladie vasculaire, et que l’évolution de leur usure à l'âge adulte serait négligeable, résume le clinicien Aussi, adopter une hygiène de vie saine, comme le suggèrent certaines études, ne limiterait ni l’usure des télomères ni ses conséquences et serait donc probablement inefficace car tout serait déterminé avant l'âge adulte. »
Tout se joue pendant l'enfance
Deux hypothèses s’affrontent pour connaître les moments de la vie déterminants pour la constitution et la préservation du capital télomérique. « Le concept dominant est que les télomères courts sont liés à leur cinétique d’usure au cours du temps. Si c’est le cas, on pourrait imaginer un moyen de la prévenir, pour en limiter les conséquences, souligne le Dr Simon Toupance, maître de conférences à l’université de Lorraine. Nos travaux nous orientent vers une autre hypothèse dans laquelle la longueur des télomères est déterminée génétiquement in utero et à la naissance, et secondairement par l'influence de facteurs environnementaux au cours des premières années de vie », poursuit le biologiste. Leur taille est maximale à la naissance, avant toute division cellulaire ultérieure, et elle diminue peu à peu au fil des ans. Tout serait joué avant l'âge de 20 ans.
« Nous devons davantage étudier les facteurs environnementaux qui peuvent être responsables d’une usure télomérique au cours des premières années de notre vie, notamment les situations associées à un stress oxydant accru et à une inflammation chronique (anémie, obésité, pollution atmosphérique alimentation déséquilibrée, douleur chronique). La prévention de ces situations chez l’enfant pourrait avoir un effet très bénéfique sur la longueur des télomères, et par conséquent sur le risque de maladies liées à l’âge. » Cliniciens et biologistes recherchent ensemble comment traduire ces avancées, notamment en matière de médecine préventive, et comment envisager dans un futur proche des applications dans les dons d'organe, les greffes de moelle osseuse et certaines pathologies dont l'incidence peut être liée à la longueur des télomères.
D'après une visioconférence de Lorraine université d'excellence.