Un protocole pour encadrer la délégation de tâche
Le protocole de prise en charge de la pollakiurie et des brûlures mictionnelles non fébriles, surnommé « protocole cystite » est un protocole national destiné à faciliter l'accès à un soin non programmé. Il encadre la délégation, par le médecin traitant, de la prise en charge diagnostique et thérapeutique d'une cystite aiguë simple à l’infirmier ou au pharmacien d’officine. Introduit par la Loi du 24 juillet 2019 relative à l’organisation et à la transformation du système de santé (article 66), ce protocole est validé par la Haute Autorité de santé (HAS) et autorisé par arrêté ministériel (arrêté du 6 mars 2020 remplacé par l'arrêté du 9 mars 2023).
La condition d'exercice coordonné
Selon la réglementation actuelle, le protocole cystite ne peut être mis en place qu'au sein d'une structure d'exercice coordonné, avec les professionnels adhérant à cette structure. Depuis mars 2023, il peut être proposé par une CPTS (communauté professionnelle territoriale de santé). Les professionnels de santé intégrés à l'expérimentation « Orientation dans le système de soins (Osys) » sont également autorisés à mettre en œuvre ce protocole. Cette condition d'appartenir à une structure d'exercice coordonné devrait être prochainement supprimée, comme l'a annoncé récemment la Première ministre (voir encadré).
Un contrat de confiance entre le délégant et le délégué
L'équipe participant au protocole doit être déclarée à l'ARS (agence régionale de santé) sur la plateforme nationale en ligne « démarches simplifiées ». Le protocole peut débuter sans délai une fois le dossier déposé. L'équipe se compose d'un ou de plusieurs médecins généralistes délégants, et d'infirmiers et pharmaciens (titulaires et adjoins) délégués. Le protocole peut être mis en œuvre si au moins un médecin de la structure est signataire et accepte d'être délégant. Les professionnels délégués doivent suivre une formation spécifique. La pharmacie doit disposer d'un espace de confidentialité et d'un accès à des toilettes. L'équipement à disposition du délégué doit comporter des bandelettes urinaires pour orienter le diagnostic d'infection (leucocytes et nitrites), un autotensiomètre et un thermomètre.
À destination des femmes uniquement
Seules les patientes de 16 à 65 ans (inclus) sont éligibles au « protocole cystite ». Les femmes dont le médecin traitant n'est pas membre de la structure d’exercice coordonné ou celles sans médecin traitant peuvent en bénéficier. Les autres critères d'inclusion sont la présence d'un symptôme évocateur d'infection urinaire simple (dysurie, brûlure à la miction, pollakiurie) et son apparition récente. Le pharmacien doit recueillir, par écrit, le consentement de la patiente à participer au protocole. La patiente est libre de refuser. Lors de l'interrogatoire initial, le pharmacien doit vérifier l'absence de signes de gravité tels qu'une fièvre (mesurée par le délégué), une altération de la pression artérielle ou de la fréquence respiratoire, une douleur lombaire, des signes digestifs, etc. En présence d'un de ces signes ou si le délégué émet un doute, il oriente la patiente vers le médecin. Les femmes enceintes ou les femmes présentant des infections urinaires récidivantes (3 épisodes ou plus dans les 12 mois précédents) ne sont pas éligibles. La prise de fluoroquinolones au cours des 3 mois précédents est un critère d'exclusion, en raison du risque de sélection de germes résistants.
Prescription d'un antibiotique ou d'un ECBU
Selon le principe du protocole de délégation, le professionnel délégué est autorisé à prescrire un antibiotique au nom du médecin délégant, après avoir contrôlé l'ensemble des critères d'éligibilité. Le protocole est élaboré pour guider le professionnel délégué dans ses décisions. Si le résultat du test à la bandelette urinaire confirme l'infection, un antibiotique peut être pertinent. Deux antibiotiques peuvent être prescrits dans le cadre du protocole : la fosfomycine trométamol en première intention (3 g en prise unique), ou le pivmecillinam (400 mg 2 fois par jour 3 jours) en cas d'allergie à la fosfomycine. En cas d'allergie ou de contre-indication à ces antibiotiques, le délégué prescrit un ECBU et oriente vers le médecin.
Les supports au protocole
Des documents type (ordonnance, consentement, compte rendu) ont été élaborés. L'ordonnance doit mentionner le médecin délégant et le professionnel délégué, identifiés l'un et l'autre par leur numéro RPPS. Un compte rendu établi par le délégué est adressé au médecin traitant de la patiente ou à un médecin membre de la structure d'exercice coordonné via l’espace numérique en santé ou par messagerie sécurisée de santé.
Facturation et rémunération
Pour les patientes acceptant le protocole, les médicaments ou les examens prescrits sont remboursables selon le droit commun. Lors de la facturation, le dispensateur renseigne le RPPS du médecin délégant en tant que prescripteur. La structure est rémunérée par la CPAM de rattachement à hauteur de 25 euros par acte de délégation (même s'il n'y a pas de dispensation de médicament ou si la patiente est réorientée vers le médecin). Cette somme est répartie librement entre les professionnels concernés.