Préservation du patrimoine

Les pharmaciens portugais sauvent une pharmacie historique de Syrie

Publié le 19/10/2015
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Alors que le riche patrimoine historique et architectural de la Syrie est ravagé par la guerre civile et la barbarie, les bonnes nouvelles concernant ce pays sont suffisamment rares pour ne pas être applaudies : c’est ainsi que le musée portugais de la pharmacie a récemment sauvé et restauré une pharmacie historique autrefois située au cœur de Damas.

Ouvert en 2006 et considéré comme l’un des plus beaux musées pharmaceutiques du monde, le musée portugais de la pharmacie est entièrement géré par l’association des pharmaciens portugais (ANF). Il dispose de deux sites, l’un à Lisbonne et l’autre à Porto, ville qui accueille notamment des anciennes pharmacies du monde entier, patiemment restaurées.

Depuis le mois de mai dernier, le musée expose, dans sa collection, une pharmacie damascène datant du XIXe siècle, qui constitue désormais l’un de ses joyaux. Duarte Santos, pharmacien et directeur de l’ANF, a présenté cette officine lors du congrès annuel de la FIP qui vient de se tenir à Düsseldorf, et qui s’achève traditionnellement par une matinée historique.

Autrefois, explique-t-il, les pharmacies de Damas étaient souvent intégrées dans des palais, et servaient aussi bien à leurs résidents qu’à la population générale. Cela explique la splendeur et le luxe de certaines officines, à l’image de celle conservée au musée, entièrement décorée de marqueterie en bois précieux, et rehaussée de dorures et de miroirs.

La pharmacie date des dernières décennies de l’époque ottomane, et présente, dans sa décoration, une synthèse entre les techniques décoratives musulmanes et les courbes et motifs visiblement influencés par les courants néobaroques venus d’Europe, mais très en vogue dans la Turquie de la fin du XIXe siècle. Rappelons en effet que la Syrie fit partie de l’Empire turc jusqu’en 1918, Damas étant alors considérée comme sa ville la plus somptueuse.

« Il a fallu 10 restaurateurs et 20 mois de travail pour redonner à l’officine son lustre d’antan », souligne M. Santos. Il précise toutefois que le musée n’est pas allé la chercher sur place, mais l’a rachetée à un antiquaire londonien, où elle croupissait depuis des années, en très mauvais état. « Dans notre situation économique actuelle, tant au niveau général qu’au niveau des pharmacies, ce fut un énorme défi que de mener à bien cette restauration, mais nous avions tous beaucoup d’enthousiasme pour cela », explique-t-il.

Aujourd’hui, l’officine présente, sur ses rayonnages, des objets et des documents historiques illustrant l’importance du monde musulman, depuis ses origines, pour les progrès de la médecine et de la pharmacie. Témoins préservés d’une splendeur aujourd’hui révolue, ses « 62 mètres carrés d’art et d’histoire » rappellent aussi, au-delà des drames contemporains, l’éternité du dialogue scientifique et culturel entre l’occident et l’orient…

Pour voir plus de photos de cette pharmacie, le musée la présente en détail sur une page facebook : https://www.facebook.com/museufarmacia.
Denis Durand de Bousingen

Source : Le Quotidien du Pharmacien: 3209