C’est une boîte en métal de 12 mètres de long et environ 2,5 m de haut et de large pas tout à fait comme les autres qui a embarqué à la mi-décembre sur le CMA CGM Harmony, un porte-conteneurs accueillant plusieurs milliers de boîtes (presque) pareilles à celles-ci.
Élaboré pour le compte d’Action Contre la Faim, ce conteneur baptisé PharmaBox est en fait une pharmacie mobile dédiée aux zones hostiles et de conflits. Après un passage par le port de Kribi au Cameroun, il arrivera, chargé de médicaments, en République centrafricaine après un voyage de 1 500 km à dos de camion.
Malnutrition et projets de santé primaire
« Quand on se retrouve dans certaines zones, on ne peut pas s’appuyer sur des structures de type centre de soins ou hôpitaux. Il est très difficile dans ces conditions de stocker des médicaments sous température contrôlée », explique Gaëtan Dayon, directeur logistique d’Action contre la Faim ; une ONG qui s’appuie sur une équipe d’une dizaine de pharmaciens déployés dans différents pays ; car Action Contre la Faim ne s’occupe pas uniquement de nourrir mais aussi de soigner. « Depuis une dizaine d’années, nos missions ont évolué. Afin de réduire la mortalité infantile, nous intégrons la prise en charge de la malnutrition à des projets de santé primaire. Chez les enfants de moins de 5 ans et les femmes allaitantes, il faut, en plus de la nutrition offrir une prise en charge contre la diarrhée, les infections respiratoires et bactériennes, ainsi que contre les parasites comme le paludisme », détaille Hugo Randé, pharmacien de 36 ans, qui a travaillé à Médecins du Monde avant de rejoindre Action contre la Faim il y a 8 ans pour en devenir le référent pharmacie… et seul pharmacien en poste en France.
Le conteneur de 22 m3, permet la prise en charge médicale et nutritionnelle de plus de 17 000 enfants de moins de 5 ans
Techniquement, le conteneur a été transformé pour garantir une capacité de stockage de 22 m3, permettant la prise en charge médicale et nutritionnelle de plus de 17 000 enfants de moins de 5 ans. Autonome en énergie grâce à des panneaux solaires sur son toit, il permet, grâce à un climatiseur et un déshumidificateur de maintenir une température constante entre 20 et 25 °C et un taux d’humidité inférieur à 65 %, quelles que soient les conditions extérieures.
Les médicaments stockés ici seront majoritairement entreposés sous forme solides (antibiotiques de première intention et à large spectre, antipaludéen…) mais la PharmaBox abritera également quelques références de sirops, des antiseptiques, et crèmes, antibiotiques et antifongiques, voire des tests de diagnostic rapide et
quelques injectables « pour les traitements de préréférencement à un niveau de soin supérieur », précise Hugo Randé.
Ainsi, Action Contre la Faim, qui travaille majoritairement avec des présentations génériques dispose, par pays, d’une liste de médicaments essentiels, établie par les autorités locales, permettant de traiter « 90 à 95 % des pathologies courantes rencontrées dans le pays ».
La création de la PharmaBox a nécessité moins d’un an de R&D aux équipes de la Fondation CMA CGM particulièrement fières de ces délais. « Il a fallu penser à la couleur. Le blanc s’est révélé la meilleure solution pour rejeter naturellement la chaleur. À la base nous pensions utiliser un conteneur réfrigéré… mais, assez contre intuitivement, cette option ne s’est pas révélée la plus opérationnelle », détaille notamment Marion Dupuy responsable de la Fondation CMA CGM. Adossée au puissant armateur, elle est depuis 2012 partenaire d’Action Contre la Faim pour qui elle a déjà transporté quelque 7 000 tonnes de matériels dans 700 conteneurs.
À terme, la PharmaBox n’a pas vocation à remplacer les pharmacies locales. « C'est un système intéressant pour les secteurs isolés géographiquement. Elle apporte un accès aux soins à des populations déplacées se trouvant dans une situation temporaire », rappelle Hugo Randé. Le temps pour elle d’arriver en Centrafrique, la pharmacie mobile d’Action Contre la Faim sera testée au premier semestre, avant, peut-être, de faire des petites.
Guillaume Mollaret