Il ne reste plus que 2 000 militaires français environ au Mali. Ils sont installés sur trois bases, dont l'une, à Gao, est une forteresse. Il faudra un an environ pour que nos soldats s'éparpillent dans d'autres États du Sahel. Ils ne pourront le faire qu'après avoir obtenu l'assentiment des gouvernements africains concernés.
Ces gouvernements sont favorables à la présence française. Cependant, l'Élysée devra être attentif à ne pas être de nouveau critiqué pour le passé colonial de notre pays, même si son intervention, à partir de 2014, a empêché le Mali de tomber aux mains des extrémistes islamiques. Il ne s'agit pas d'un simple déménagement. Il est plutôt question d'une refondation des alliances à négocier avec les pouvoirs en place au Sahel qui ont déjà critiqué l'attitude irresponsable de la junte malienne et lui ont appliqué un embargo.
M. Macron n'a pas l'intention de reconstituer Barkhane mais de lutter contre la subversion au Sahel par des moyens à la fois puissants et discrets, ce qui représente une gageure. Il n'est pas homme à se laisser impressionner par l'ampleur de la tâche, mais il sait qu'il n'est pas seul, qu'il est soutenu par les pays de l'Union européenne et nombre de gouvernements africains qui ont déjà sanctionné la junte au niveau des échanges, commerciaux notamment.
Cependant, dès lors que nos militaires restent au Sahel, il faut qu'ils soient efficaces et leurs méthodes doivent changer s'ils prennent leurs distances avec le Mali, ce qui ne facilite guère leurs interventions contre les terroristes. Ils ont affaire à une junte qui recourt à des méthodes ultra-démagogiques pour convaincre la jeunesse malienne que les milices russes valent mieux que l'armée française et, au fond, ne sait pas vraiment ce qu'elle doit faire, les déclarations mensongères et à l'emporte-pièce n'ayant qu'un seul fondement : la propagande.
De la médiation à l'action
La présence des Russes au Mali est particulièrement gênante pour les soldats français. Une autre crise, encore plus grave, se déroule en Ukraine qui, à tout moment, risque d'être envahie par la soldatesque russe. Or, dans cette affaire, Emmanuel Macron, président de l'Europe, a tenté de convaincre Vladimir Poutine de retirer ses troupes, ce que Poutine a annoncé mais sans le faire. Médiateur en Europe, Macron se retrouve opposé à la Russie au Mali.
Nous avons consacré énormément de ressources à la défense de cet État africain et, en huit ans, nous y avons perdu plus de 50 de nos soldats. Nous sommes bien mal récompensés pour cet effort. Mais, aujourd'hui, nous n'avons plus la responsabilité de protéger les Maliens, nous devons tout faire pour contenir la vague djihadiste et l'empêcher de se déverser sur le continent européen. Charité bien ordonnée commence par soi-même.
Il ne fait pas de doute que Maliens et Russes nous mettront des bâtons dans les roues pendant l'évacuation, d'abord en montrant leur impatience, puis en recherchant le contact pendant le voyage de nos troupes. Ce sera l'affaire de l'armée de rester indemne pendant la traversée du désert et celle du gouvernement de négocier avec d'autres États africains les points de chute de nos soldats. Il faut faire comme Macron et ne pas perdre de temps à commenter la trahison de la junte qui, pour se maintenir au pouvoir par tous les moyens, a choisi la France comme bouc émissaire en sachant fort bien qu'elle faisait preuve ainsi de la pire déloyauté.
M. Macron a jugé que nous ne saurions imiter les officiers de la junte, que nous ne changerions pas de méthode (sauf si des échauffourées se produisaient) et que nous continuerions à protéger nos intêts au Sahel, ainsi que ces États qui nous sont encore fidèles. Le gouvernement français, ou plutôt celui qui le remplacera, est donc appelé à une réforme stratégique qui concerne tout l'ouest de l'Afrique et toute l'Union européenne.