Selon une décision de l’Agence des médicaments et des produits de santé dévoilée le 9 décembre, la dispensation à l’officine des spécialités françaises à base de pseudoéphédrine est, à compter de demain, soumise à prescription médicale.
Assez dangereuses pour ne plus être dispensées sans ordonnance, mais pas assez pour que leurs AMM soient purement et simplement supprimées par l’Agence du médicament et des produits de santé, les autorités sanitaires françaises ont finalement tranché : les spécialités à base de pseudoéphédrine jusque-là en vente libre à l’officine seront soumises à prescription médicale à compter de mercredi. Les présentations orales de pseudoéphédrine sont ainsi désormais classées en liste 1.
« Au regard d’une part des très nombreuses contre-indications, précautions d'emploi et des effets indésirables connus de la pseudoéphédrine et d’autre part du caractère bénin du rhume », l'ANSM considère que « la possibilité d’obtenir ces médicaments sans avis médical fait courir un risque trop important aux patients ». « Nous demandons aux médecins prescripteurs de bien évaluer la balance bénéfice/risque pour chaque patient avant de lui prescrire un de ces médicaments », a ajouté l'ANSM dont la décision d'interdiction était attendue.
Sont concernées par cette décision les présentations suivantes : Actifed Rhume, Actifed Rhume jour et nuit, Dolirhume Paracétamol et Pseudoéphédrine, Dolirhumepro Paracétamol Pseudoéphédrine et Doxylamine, Humex Rhume, Nurofen Rhume, Rhinadvil Rhume, Ibuprofène/Pseudoéphédrine, Rhinadvilcaps, Rhume Ibuprofène/Pseudoéphédrine.
Ces spécialités – les principaux traitements du rhume jusque-là toujours en vente libre -, qui contiennent tous de la pseudoéphédrine, sont largement considérées comme dangereuses depuis des années. À l'approche de l'hiver, les autorités sanitaires françaises envisageaient de mettre fin à ce paradoxe.
Ces médicaments font en effet l'objet depuis plusieurs années de nombreuses critiques, à commencer par l'ANSM elle-même, car ils peuvent provoquer de graves effets secondaires comme des AVC et des infarctus. En 2023, l'agence avait pour la première fois déconseillé explicitement leur utilisation. Cette décision avait, pour un temps, fait décliner les ventes de traitements anti-rhume. Mais celles-ci rebondissent depuis septembre. Pourquoi ne pas avoir interdit plus tôt ces médicaments ? Les autorités sanitaires françaises expliquaient régulièrement avoir les mains liées par la réglementation européenne qui soumet le retrait d'une autorisation à l'avis de l'Agence européenne du médicament (EMA). Or, celle-ci avait estimé l'an dernier que les traitements concernés ne présentaient pas de risques suffisants pour les interdire, même si elle a imposé de nouvelles contre-indications. Une décision vivement critiquée par la revue « Prescrire », qui avait déploré alors « une occasion ratée (de) protéger les patients ». Cet avis s'explique par le fait que les effets secondaires graves restent très rares. Ils sont quelques-uns à être signalés chaque année et, en France, aucun décès n'a été rapporté. Les autorités françaises ont fini cependant par trancher en estimant que le risque, même faible, était inacceptable au vu du caractère bénin de la maladie traitée : un simple rhume.
Au total, cette décision devrait contenter une majorité de pharmaciens, qui, à en croire le sondage réalisé sur LeQuotidiendupharmacien.fr, se disaient favorables, à hauteur de 28 %, au listage de la molécule. Même si 41 % d’entre eux seraient allés, jusqu’à la suppression des AMM. Un avis notamment partagé par le Pr Alain Astier, membre de l’Académie de pharmacie, qui déclarait le 22 novembre sur « Franceinfo » : « Il faut complètement les retirer du marché (…) Il est grand temps. Cela fait des années que beaucoup de collègues ont montré la dangerosité et l'inutilité finale de ce type de produits. »
Avec AFP