Nouvelles missions, augmentation de l'activité ou du bassin de population où l'officine est installée… Voilà autant de facteurs qui amènent le titulaire à étoffer son effectif. Une ambition qui bute toutefois souvent sur un obstacle : le recrutement d'un préparateur.
Depuis le mois de février, Stéphanie G. est en quête de la perle rare. Titulaire à Toulouse, ville attractive qui voit sa population croître d'années en années, elle a reçu plusieurs candidats pour des entretiens qui n'ont, jusqu'à présent, pas débouché sur la moindre embauche. « Les préparateurs sont très très demandés dans la région toulousaine, ils ont parfois dix rendez-vous dans la même journée pour trouver un emploi, constate-t-elle. Il n'est pas rare non plus qu'ils soient approchés par des pharmaciens avant même d'être diplômés. »
Recherches sur Facebook, CV obtenus en passant par Pôle Emploi et même participation à des speed dating organisés par le centre de formation d'apprentis (CFA), Stéphanie G. utilise ces différents canaux mais se heurte, souvent, aux exigences des candidats. « Certains préfèrent les contrats courts, ou bien privilégient les remplacements car ils ont des projets personnels qui les attendent. D'autres ne veulent pas travailler le samedi. Des postulants qui viennent tout juste d'achever leur formation demandent des salaires équivalents à ceux de préparateurs qui ont plusieurs années d'expérience… » Dans certaines villes ou régions, comme à Toulouse, les préparateurs savent qu'ils sont une denrée relativement rare et n'hésitent pas à faire jouer la concurrence pour obtenir des rémunérations plus élevées.
Préparatrice dans l'Yonne et représentante du syndicat CFE-CGC, Christelle Degrelle confirme que le manque de préparateurs pousse bien souvent les officinaux à leur proposer des rémunérations supérieures à celles fixées par la grille. Une donnée qui n'a pas échappé aux préparateurs diplômés ces dernières années. « C'est la loi de l'offre et de la demande. Les jeunes ont bien raison de demander des salaires plus élevés que ce qui est normalement prévu. Quand on commence à 1 200 euros, difficile de voir son salaire grimper sensiblement ensuite », déclare-t-elle.
Une profession encore trop méconnue
Fin connaisseur de la situation des préparateurs en Ile-de-France, Armand Grémeaux, pharmacien et dirigeant de Pharm'emploi, société spécialisée dans le recrutement et la formation en officine, estime que cela fait « 3 ou 4 ans que le manque de préparateurs se fait vraiment sentir ». À Paris et dans ses alentours, la concurrence est aussi très rude, « très rapidement, un préparateur peut obtenir quatre propositions d'emploi proches de son domicile ». Pour faire en sorte qu'un nombre plus important de préparateurs soit disponible sur le marché, il estime que beaucoup de travail reste à accomplir pour que le métier soit mieux connu des jeunes. « Il faut que les pharmaciens viennent prêcher la bonne parole dans les lycées. Les écoles qui forment les préparateurs devraient être davantage présentes dans les forums pour l'emploi. »
Plus de notoriété donc, mais aussi et surtout une meilleure valorisation de la profession, notamment à l'heure des nouvelles missions. « Permettre aux préparateurs de vacciner contre la grippe ? Oui, pourquoi pas, estime-t-il. Je ne pense pas que l'Ordre soit du même avis, mais toujours est-il que les préparateurs seraient compétents pour le faire et qu'ils pourraient permettre aux pharmaciens de ne pas être débordés en cas de demande importante. » Un renforcement du rôle de préparateur qui pourrait augmenter l'attractivité du métier. « Aujourd'hui, cette profession est une impasse. Il n'y a aucune perspective d'avenir, aucune passerelle vers d'autres métiers, la validation des acquis de l'expérience (VAE) n'existe pas… pas étonnant que de plus en plus de préparateurs choisissent la voie hospitalière ou partent après 10 ou 15 ans d'officine et deviennent représentants pour des marques de cosmétique », déplore Armand Grémeaux.
Vers une formation niveau bac + 3 ?
Syndiquée depuis 15 ans, Christelle Degrelle travaille depuis presque autant d'années sur la question du référentiel diplôme. « Lorsqu'ils se retrouvent derrière le comptoir, il y a encore beaucoup de choses que les diplômés ignorent complètement. La formation doit être complètement transformée », déclare-t-elle.
Véritable serpent de mer, la question de l'évolution du rôle du préparateur ne laisse en tout cas pas insensibles certaines universités. Dès la rentrée 2020, la faculté de Marseille expérimentera une formation de préparateur au niveau licence, soit bac +3. Un essai où l'apprentissage conservera toute sa place et qui pourrait peut-être inspirer très bientôt d'autres établissements. Un diplôme de meilleur niveau, pour lequel milite Christelle Degrelle, afin de permettre au préparateur de « seconder le pharmacien dans l’exercice de ses missions » et notamment pour la vaccination. Comme l'a rappelé Alain Guilleminot lors du Congrès national des pharmaciens à Bordeaux, le 20 octobre, « mettre en place les missions ne sera pas possible si toute l'équipe ne participe pas ». Le président de l'UTIP (organisme de formation continue pour les officinaux) propose pour cela la création d'un nouveau statut : le PPA (préparateur de pratique avancée) « qui interviendrait dans la chaîne d’accueil du patient à l’officine avant de passer le relais à un pharmacien ».
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