Près d’une personne sur trois vivant avec un diabète déclare avoir présenté un trouble psychique diagnostiqué, tel que la dépression ou l’anxiété. C’est ce que révèle le baromètre DiaMind réalisé par le Diabète Lab de la Fédération française des diabétiques (FFD), qui a souhaité quantifier le fardeau « sous-estimé » du diabète sur la santé mentale. « La santé mentale – cette année désignée grande cause nationale – est un angle mort de la prise en charge et représente une problématique importante remontée par nos lignes d’écoute », confie le Dr Jean-François Thébaut, vice-président de la FDD en charge du plaidoyer et des affaires externes, lors de la présentation des résultats.
À l’occasion de la Journée mondiale du diabète ce 14 novembre, la FFD dévoile les résultats de DiaMind et propose des solutions pour accompagner les patients. « Si le dépistage du diabète en lui-même est important, celui des complications tant cliniques que psychologiques l’est tout autant, comme leur prévention », commente le Dr Thébaut.
Santé mentale, sexe féminin et défaveur sociale
Le baromètre a bénéficié des réponses de 2 600 personnes vivant avec un diabète, « un engouement très important », selon Arnaud Bubeck, responsable du Diabète Lab. Les personnes étaient atteintes pour 43 % d’entre elles d’un diabète de type 1 et pour 55 % d’un type 2, et étaient à 55 % des femmes. « Dans les grandes lignes, nous avons constaté que le fait d’être une femme et la défaveur sociale sont plus fortement liés à un diagnostic de trouble psychique. Le type de diabète ne fait pas de différence », commente Arnaud Bubeck.
L’auto-questionnaire a permis d’établir des scores de dépression et d’anxiété. « Il apparaît que 15,8 % des participants ont une symptomatologie certaine sur le score de dépression et 28 % sur celui d’anxiété », détaille le responsable du Diabète Lab. Les scores étaient corrélés au niveau de revenus avec 6,9 % de symptomatologie certaine de dépression chez les personnes gagnant plus de 2 900 euros/mois et 27,4 % chez celles gagnant moins de 1 400 euros/mois. Les femmes étaient aussi plus concernées par les troubles psychiques.
Parmi les personnes ayant eu un trouble psychique, 31 % pensent que ce dernier n’est pas en lien avec la gestion de leur diabète, tandis que 50 % pensent qu’il l’est ; et les personnes avec diabète de type 1 étaient plus nombreuses à l’associer au diabète. Près de 70 % des personnes avec un trouble psychique – majoritairement des femmes – ont déclaré avoir vécu un événement traumatisant dans leur vie sans lien avec le diabète.
De manière générale, les répondants ne sont qu’un tiers à avoir déjà consulté un professionnel de la santé mentale depuis leur diagnostic de diabète, plus souvent des femmes, et les deux tiers d’entre elles (67,3 %) confient que cela leur a semblé utile. Les personnes aux plus faibles revenus ont rapporté avoir le sentiment d’avoir besoin de consulter mais étaient les moins nombreuses à le faire.
Au-delà des troubles psychiques, les personnes vivant avec un diabète sont aussi confrontées à une détresse liée à leur maladie
Sarah Clément, psychologue spécialisée
Le Diabète Lab propose ainsi de prendre en compte les déterminants socio-démographiques pour élaborer des politiques de santé, d’informer et de former les professionnels de santé sur la prévalence élevée des troubles anxieux et dépressifs chez les personnes vivant avec un diabète, de développer des interventions psychologiques ciblées, de valoriser le rôle des soignants dans la détection et l’accompagnement des troubles psychiques et de reconnaître les événements de vie marquants ou traumatisants. De son côté, la FFD a rappelé qu’elle proposait des espaces de pair-aidance, une ligne d’écoute et des programmes d’accueil et de soutien en ligne.
Détresse liée à la maladie
« Au-delà des troubles psychiques, les personnes vivant avec un diabète sont aussi confrontées à une détresse liée à leur maladie », expose Sarah Clément, psychologue spécialisée dans l’accompagnement d’enfants et adolescents avec une maladie chronique et de leur famille. La détresse liée au diabète est définie comme une « réponse émotionnelle à la vie avec le diabète et la gestion de cette maladie » et n’est pas considérée comme un trouble psychique, bien qu’elle puisse cohabiter avec l’un d’eux. « Cette détresse résulte de la préoccupation/inquiétude liée aux exigences de la gestion de la maladie, aux décisions thérapeutiques, aux résultats non conformes aux attentes et efforts, à la surveillance de la glycémie ou encore aux respects des règles hygiéno-diététiques, détaille la psychologue. Au final, toute la vie se résume au diabète. »
Cette détresse peut avoir comme conséquence un mauvais équilibre du diabète ou encore une mauvaise hygiène de vie et ainsi une exposition au risque de complications. Bien que difficile à quantifier, elle pourrait affecter près de la moitié des personnes vivant avec un diabète, selon certaines études. La psychologue incite ainsi les professionnels de santé à en informer les patients et leur famille et à tenter de prévenir l’intensité du phénomène. « Des questionnaires validés en français sont disponibles », indique Sarah Clément.
Enfin, DiaMind révèle que 56 % des répondants estiment que la gestion des dispositifs médicaux leur demande un effort, et ce dernier est plus important pour les femmes. « Nous nous apercevons que les dispositifs médicaux peuvent devenir une source de préoccupation ou d’inquiétude pour les patients, alors même qu’ils sont censés les aider au quotidien », complète le Dr Jean-François Thébaut. Une récente étude française montre d’ailleurs dans le diabète de type 1 de l’enfant que le type de dispositif utilisé a des effets sur la santé mentale et la qualité de vie.
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