La prise de nourriture peut compromettre la bonne absorption ou l'élimination des médicaments car les aliments empruntent les mêmes voies pour leur assimilation et leur dégradation dans l'organisme. Ils peuvent en accélérer ou en freiner le métabolisme et provoquer leur accumulation et un surdosage toxique dans le sang, en agissant sur les enzymes digestives, en perturbant les fonctions du foie, des reins ou de l'estomac ou intervenir en entrant en compétition avec eux. En revanche, certains médicaments sont pris de préférence avec de la nourriture pour éviter des troubles digestifs (AINS, aspirine) et d'autres peuvent être à l'origine de déséquilibres alimentaires en diminuant l'absorption de nutriments.
Les principaux aliments en cause
Le sel (sodium) est à utiliser avec précaution car il favorise la rétention d'eau dans les cellules et peut perturber l'action des diurétiques, des antihypertenseurs, des corticoïdes en freinant l'élimination de l’eau et la charge hydrique hors de l'organisme.
Les aliments riches en vitamine K (abats, choux, carottes, épinards, laitue) ne font pas bon ménage avec les anticoagulants de la famille des antivitamine K (AVK), ils peuvent modifier leur activité et favoriser la survenue d'hémorragies ou la formation de caillots.
Avec les corps gras c'est plus nuancé : un repas à forte teneur en graisses peut soit gêner soit faciliter l'absorption des médicaments selon leur liposolubilité.
Au rayon des boissons, l'alcool est un coupable irréfutable, il agit sur certaines enzymes du foie responsables du métabolisme des médicaments et les interactions sont nombreuses (anti-inflammatoires paracétamol, tranquillisants, hypnotiques, antidépresseurs, antibiotiques). D'autre part, du fait de la déshydratation liée à sa consommation, la concentration sanguine des médicaments augmente et leurs effets indésirables sont plus marqués. Quelle que soit sa consommation, ponctuelle ou chronique, l'alcool est toujours déconseillé en cas de prise médicamenteuse et pas seulement avec les traitements qui réduisent la vigilance.
Les furanocoumarines du pamplemousse qui interviennent au niveau hépatique peuvent provoquer des dégâts en augmentant l'absorption des statines, des anti épileptiques ou des immunosuppresseurs
Le jus de pamplemousse est aussi au banc des accusés, les responsables sont les furanocoumarines présentes dans la chair sous l'écorce du fruit. Ils interviennent au niveau hépatique et peuvent provoquer des dégâts en augmentant de façon importante l'absorption des statines, des anti épileptiques ou des immunosuppresseurs. Les interactions sont possibles non seulement avec le jus mais aussi avec le fruit frais et les préparations après cuisson comme les confitures. Les oranges amères, les bergamotes, les citrons verts sont également concernés.
Les amateurs de réglisse (glycyrrhizine) présente dans les friandises mais aussi dans de nombreuses boissons gazeuses ou alcoolisées (pastis, ouzo, raki, bières, sirops, Antésite…) doivent modérer leur gourmandise en cas de cœur fragile. Sa consommation régulière et excessive compromet fortement l'efficacité des traitements contre l'hypertension artérielle et les troubles du rythme cardiaque.
Le thé, le café, et les sodas énergisants peuvent aggraver les situations de stress et d'anxiété en perturbant l'action des tranquillisants et des hypnotiques. Le thé vert diminue l'assimilation du fer et des anticoagulants.
Les médicaments perturbateurs alimentaires
Les médicaments contenant des pansements digestifs protecteurs et les adsorbants sont bien connus pour diminuer l'absorption de nombreux micronutriments (vitamines, minéraux oligoéléments).
Les laxatifs lubrifiants (huile de paraffine) ou stimulants en prise prolongée peuvent réduire l'absorption de vitamines A, D, E, K et provoquer une perte des sels minéraux (potassium).
La prise de certains diurétiques nécessite une surveillance de l'apport alimentaire de potassium. La spironolactone étant un épargneur de potassium, il faut éviter les aliments riches en potassium (tomates séchées, haricots blancs, bananes, kiwis, avocats, chocolat noir), alors qu'un apport alimentaire supplémentaire en potassium est conseillé pour contrer les effets du manque de potassium causé par le furosémide.
Les antibiotiques de la famille des cyclines ne sont automatiques avec ils se fixent sur le calcium et diminuent son absorption digestive, et ceux de la famille des fluoroquinolones augmentent les effets de la caféine (la consommation de café ou de thé est limitée pendant le traitement).
Christine Nicolet
Quelques conseils
- Ne pas exclure les aliments mis en cause mais les consommer avec modération.
- Privilégier l'eau pour la prise des médicaments.
- Observer un délai de quelques heures entre la prise du médicament et celle de l'aliment.
- Ne pas prendre tous les médicaments prescrits en une seule prise.
- Tenir compte de la teneur en nutriments de certains compléments alimentaires.
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