Endocrinologie

La Fédération internationale du diabète appelle à reconnaître le type 5 lié à la malnutrition

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Publié le 02/10/2025
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Un groupe de travail rassemblé par la Fédération internationale du diabète vient de rendre ses conclusions : il existe bien un diabète lié à la malnutrition. Ils proposent de le classifier en tant que diabète de type 5.

Les experts estiment que la lutte contre ce diabète passe largement par le maintien et l'accélération de programmes contre la pauvreté et la faim

Les experts estiment que la lutte contre ce diabète passe largement par le maintien et l'accélération de programmes contre la pauvreté et la faim
Crédit photo : PHANIE

Alors que les diabètes de type 3 et 4 font encore l’objet d’âpres discussions, un groupe d’experts rassemblés par la Fédération internationale du diabète vient de publier, dans le Lancet Regional Health, un article de consensus plaidant pour la reconnaissance officielle d’un cinquième type de diabète favorisé par la malnutrition, touchant principalement les pays à revenus faibles ou intermédiaires.

Ce groupe de travail a été mis en place en avril, à l’occasion du congrès annuel de la fédération, sous la coprésidence de la Dr Meredith Hawkins, endocrinologue et directrice du Global Diabetes Institute de l'Albert Einstein College of Medicine (New York) et du Dr Nihal Thomas, professeur d'endocrinologie au Christian Medical College (Vellore, Inde).

Depuis 1955, une forme de diabète est décrite dans la littérature chez des individus jeunes et minces (IMC < 18,5 kg/m² et âge < 30 ans) présentant des antécédents suggérant une dénutrition depuis la naissance et tout au long de l'enfance. L’OMS l’a officiellement classé comme diabète lié à la malnutrition en 1985 avant de rétropédaler en 1999. À l’époque, il y avait une grosse incertitude sur la capacité de la dénutrition à constituer un facteur de risque suffisant pour provoquer un diabète.

Altération de la sécrétion pancréatique

Selon le groupe de travail, « de nouvelles données probantes étayent désormais fortement la classification distincte de ce phénotype de diabète unique, caractérisé par une altération importante de la sécrétion pancréatique d'insuline, une sensibilité hépatique et périphérique normale à l'insuline, une absence d'acidocétose et d'autoanticorps anti-îlots pancréatiques. » Les auteurs évoquent notamment des travaux menés au Bangladesh, en Éthiopie, en Inde, en Indonésie, au Nigeria, en Ouganda, au Pakistan et au Rwanda.

Bien qu’identifié depuis longtemps, la physiopathologie de ce diabète n’a pas fait l’objet de beaucoup de travaux

Les experts appellent la communauté internationale du diabète à reconnaître cette forme distincte de la maladie et à promouvoir les recherches sur son phénotype, sa physiopathologie et son traitement. « On estime que 25 millions de personnes dans le monde en sont atteintes », calculent-ils. Bien qu’identifié depuis longtemps, la physiopathologie de ce diabète n’a pas fait l’objet de beaucoup de travaux. La principale hypothèse est qu’il serait en fait causé par un retard de développement du pancréas dû à des carences nutritionnelles sur le long terme. « Cette forme atypique de diabète survient principalement dans des régions pauvres, ce qui fait qu’elle a bénéficié de beaucoup moins d’attention que les diabètes de type 1 et 2 », regrettent les auteurs.

La prise en charge est également largement inconnue : la perte de poids n'est logiquement pas indiquée et l'effet des traitements traditionnels à base de metformine ou d'insuline reste incertain. Les experts estiment à ce stade que la lutte contre ce diabète passe largement par le maintien et l'accélération de programmes contre la pauvreté et la faim, notamment en « augmentant l'accès à des aliments simples, bon marché, nourrissants et riches en protéines », concluent-ils.

Les personnes peuvent dans leur majorité gérer leur diabète grâce à des médicaments oraux plutôt qu’avec des injections d'insuline. Étant donné que le diabète de type 5 est principalement présent dans les milieux à faibles ressources, cette approche rentable pourrait s'avérer importante.

Des sous-types de diabète

La classification du diabète en deux grandes entités, type 1 et 2, est remise en cause par plusieurs études. Le Pr Serge Halimi, de l’université Grenoble-Alpes, a fait très récemment le point sur ce nouveau sous-type de diabète, insulinodépendant, non auto-immun présent en Afrique subsaharienne et chez les Afro-américains.

L’étude Yoda publiée dans le Lancet Diabetes and Endocrinology avait notamment identifié, chez des enfants et jeunes adultes d’origine noire africaine diagnostiqués avec DT1, une forte proportion de patients dépourvus d’anticorps anti-îlots de Langherans caractéristiques du DT1, tout en ayant un taux de peptide C incompatible avec un diabète de type 2. Leur phénotype ne correspondait donc à aucune des deux grandes catégories de diabète.

« Ces formes “d’allure DT1” sont hétérogènes, et cette entité de DT1 non auto-immun, bien identifiée ici (moins dans d’autres travaux hors Afrique), pose la question de ses mécanismes pathogéniques. Peut-être découle-t-elle de causes propres à ces régions du monde — sous-nutrition, alimentation spécifique, infections, virus ? », questionnait alors le Pr Halimi.

De plus, il n’y a pas de consensus autour du diabète de type 3, qui fait référence à une résistance à l’insuline spécifique au cerveau liée à la maladie d’Alzheimer, ni du diabète de type 4, qui serait une résistance à l’insuline du sujet âgé sans obésité. L’existence même de ces catégories, très débattues et considérées comme marginales, n’est pas reconnue par les sociétés savantes.

Damien Coulomb

Source : Le Quotidien du Pharmacien