
C’est ainsi que le Pr Xavier Girerd (GH Pitié-Salpêtrière, Paris), éminent hypertensiologue*, a souligné le rôle important que le pharmacien d’officine peut jouer à de multiples niveaux. À la fois en participant au dépistage de l’hypertension artérielle (annuel à partir de 30 ans, voire avant, vers 25 ans, le cas échéant ; et systématiquement à partir de la cinquantaine) et au suivi vigilant de ce qui a été qualifié de « tueur silencieux » par des auteurs Anglo-Saxons. De fait, la complication très fréquente d’une hypertension artérielle non diagnostiquée est représentée par un accident vasculaire cérébral. Mais, parfois, malheureusement, la maladie se révèle à l’occasion d’une mort subite.
Quatre principaux facteurs de risque
Il a rappelé à ce sujet l’importance d’avoir toujours à l’esprit les quatre principaux facteurs favorisant la survenue d’une hypertension artérielle, certains modifiables et d’autres non. À savoir, le vieillissement, qui vient en toute première position (les plus de 60 ans ont 7 « chances » sur 10 d’être hypertendus), des antécédents d’hypertension artérielle avant 50 ans chez un parent, le surpoids/obésité abdominale (on connaît maintenant l’existence de nombreuses et complexes interactions entre la graisse abdominale et les mécanismes conduisant à l’élévation de la pression artérielle) – qui contrairement à une idée très répandue ne concerne pas et de loin que les milieux économiquement défavorisés -, une consommation excessive de sel (plus de 6 g/j) – très présent dans certains fromages, la charcuterie et les poissons fumés -, et des apports insuffisants en potassium (intérêt d’analyser la culture culinaire de chaque patient ; très difficile à faire modifier).
Sans méconnaître non plus le fait que les jeunes ne sont pas épargnés. En sachant que chez l’enfant il convient de rechercher systématiquement une hypertension secondaire, d’origine volontiers rénale ou surrénalienne.
Des traitements différenciés
Alors que chez l’adolescent hypertendu, souvent en surpoids, même s’il fait du sport, l’accent doit être très prioritairement mis sur la nutrition, dans le cas des patients plus âgés, une prescription antihypertensive doit être systématiquement proposée, souligne le Pr Girerd. Pour autant, a rappelé ce dernier, « leur prescription est un art et il faut savoir surveiller leur emploi ».
Un point parmi d’autres doit attirer l’attention selon le Pr Girerd : l’association sur une même ordonnance d’un anti-hypertenseur et d’une supplémentation potassique, signe d’un possible hyperaldostéronisme méritant un suivi spécialisé.
Automesure tensionnelle : une révolution qui ne cesse de progresser
Depuis 1998, l’automesure est recommandée pour confirmer une hypertension artérielle avant de débuter un traitement. Elle est également très utile dans le cadre du suivi. C’est aussi le moyen privilégié pour identifier un éventuel « effet blouse blanche », dont l’origine reste d’ailleurs débattue.
Le protocole conseillé est celui de la règle de 3 : trois mesures le matin, trois mesures le soir, pendant trois jours. Le seuil de l’hypertension artérielle est ainsi défini par une systolique égale à 135 mmHg et une diastolique à 85 mmHg.
11 millions de personnes reçoivent un traitement anti-hypertenseur dans notre pays.
À ce sujet, le Pr Girerd a mentionné l’intérêt d’une toute nouvelle technologie (Cuffless AKTIIA**) permettant une connaissance parfaite des variations tensionnelles et ne nécessitant que le port d’un bracelet plusieurs jours de suite, permettant l’acquisition, par exemple, de 3,5 millions de mesures sur une semaine (une mesure toutes les cinq secondes) ; ce qui permet, entre autres, de mieux comprendre la survenue de complications chez certains patients.
Un « pharmacien vigie »
Le pharmacien a un rôle essentiel à remplir, a conclu le Pr Girerd, non seulement en matière de coopération au dépistage, mais aussi en étant une vigie de tout ce qui se passe dans le cadre de la prise en charge de l’hypertension artérielle, notamment en informant et écoutant le patient (effets indésirables), en favorisant une bonne observance et tout ce qui concerne l’automesure tensionnelle, clé de l’adaptation du traitement.
*Il est aussi président de la Fondation de recherche sur l’hypertension artérielle.
**La lumière émise par un capteur optique détecte les changements de volume des artères sous-cutanées liés à la tension artérielle pulsatile.
Pour en savoir plus :
Fondation de recherche sur l’hypertension artérielle : https://frhta.org. Action cœur – Je me teste : https://www.action-groupe.org/fr
Le poids très important des maladies cardiovasculaires
Dans son intervention, le Pr Gilles Montalescot (GH Pitié-Salpêtrière, Paris) a rappelé le poids considérable de la morbi-mortalité cardiovasculaire.
Des maladies qui comprennent les coronaropathies, pathologies cérébro-vasculaires, artériopathies périphériques, thromboses veineuses profondes sources d’éventuelles embolies pulmonaires et les cardiopathies rhumatismales ou congénitales, se traduisant par des infarctus du myocarde, accidents vasculaires cérébraux (1re cause de handicap), insuffisances cardiaques, ischémies critiques des membres inférieurs, insuffisances rénales chroniques, démences et cécités.
En France, 15 millions de personnes sont prises en charge pour une maladie ou un risque cardiovasculaire.
Pathologies à l’origine de 150 000 décès chaque année, dont 50 000 par arrêt cardiaque.
Parmi les causes bien identifiées vient en tête l’hypertension artérielle, suivie de l’hypercholestérolémie, l’obésité, le tabagisme, le diabète, la pollution (notamment inhalée, à l’origine de phénomènes inflammatoires, de stress vasculaire et de rupture de plaque d’athérome) ainsi que le stress.
Dans ce contexte, il est important de faire un large usage d’une évaluation du risque cardiovasculaire (niveau de risque à 10 ans), via notamment des outils en ligne.
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