La cystite aiguë pourrait être un marqueur clinique d’un cancer urogénital, souvent silencieux, chez les adultes de 50 ans ou plus et particulièrement les hommes. Cette association a été mise en lumière par une équipe suédoise qui, à partir de registres nationaux, a constaté que le risque de cancers était plus élevé dans les trois mois suivant le diagnostic de cystite. Des recherches antérieures avaient déjà montré la possibilité d’un lien, mais ne disposaient pas de données provenant d’établissements de soins primaires où les cystites sont majoritairement diagnostiquées. Cette étude, qui inclut plus de 3,5 millions d’individus, suggère que « les cancers urogénitaux devraient être envisagés chez l’adulte de plus de 50 ans présentant des symptômes de cystite, et plus particulièrement pour les cancers de la prostate et de la vessie ». « Elle vient s'ajouter aux preuves de plus en plus nombreuses selon lesquelles les infections sont des marqueurs d'un risque accru de cancer », écrivent les auteurs, dans le British Medical Journal Public Health.
La cystite a précédé un diagnostic de cancer dans 9,5 % des cas
Les chercheurs ont exploité plusieurs registres nationaux, ainsi que des sources de données sur les soins primaires, contenant des informations individuelles sur toutes les personnes vivant en Suède entre 1997 et fin 2018. Ils ont ainsi analysé les données de 3 557 582 individus (46,8 % d’hommes). La prévalence à vie d'une infection des voies urinaires (IVU) « est de 50 à 60 % chez les femmes et de 13 à 14 % chez les hommes. À l'exception d'un pic chez les jeunes femmes, les taux d'incidence des IVU augmentent avec l'âge, tant chez les hommes que chez les femmes ». Dans leur cohorte, les auteurs retrouvent un premier diagnostic de cystite aiguë chez 17 % des individus, la grande majorité dans des établissements de soins primaires. Et dans 71 % des cas, chez une femme. Au terme d’un suivi moyen de 15 ans, plus de 7 % des participants ont reçu un diagnostic de cancer, dont la plupart (77,5 %) étaient des hommes, atteints le plus fréquemment d’un cancer de la prostate (62 %). L’âge moyen au moment du diagnostic était de 73 ans. Chez ces patients atteints de cancer, la cystite a précédé le diagnostic pour 9,5 % d’entre eux (âge moyen, 76 ans) : il s’agissait, dans 39,5 % des cas, d’un cancer de la prostate, 32 %, de la vessie et 14 %, de l’endomètre.
Un risque de cancer 30 à 34 fois plus élevé dans les trois mois
Les risques de cancers apparaissaient particulièrement élevés dans les 3 mois suivant l'infection, en particulier pour les cancers de la prostate et de la vessie, et persistaient (un peu à la baisse) pendant plusieurs années pour tous les cancers. « Dans l'ensemble, le risque de cancer urogénital était près de 34 fois plus élevé chez les hommes et 30 fois plus élevé chez les femmes dans les 3 mois suivant l'infection, ce qui correspond respectivement à près de 484 et 96 taux de cancer supplémentaires pour 10 000 personnes-années », synthétisent les auteurs. Pour le cancer de la prostate, ils retrouvent un taux de cas excédentaires de près de 551 cas pour 10 000 personnes-années (PA) ; pour le cancer de la vessie, un taux excédentaire de 484 chez les hommes et 96 chez les femmes pour 10 000 Pa ; pour les reins, un taux excédentaire de 3,5 chez les hommes et 1,7 chez les femmes pour 10 000 Pa ; et pour les cancers gynécologiques, les taux excédentaires étaient compris entre 7,9 et 28, selon les localisations, pour 10 000 PA. « Il est plausible que le cancer urogénital, et peut-être même les modifications précancéreuses des organes urogénitaux, augmente le risque de cystite en raison d'une altération des voies urinaires et des défenses de l'hôte. Les symptômes de certains cancers urogénitaux pourraient aussi ressembler à une cystite », avancent les scientifiques. Cependant, ils restent prudents et « ne tirent aucune conclusion définitive » quant au lien de cause à effet ; et de préciser « qu'ils ne disposaient pas de confirmation microbiologique de l'infection cystite ni d'informations sur les facteurs potentiellement influents, tels que le tabagisme et les conditions sous-jacentes, notamment l'obésité et le diabète non diagnostiqué ».
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