Oncologie

La fabrique à tumeurs

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Publié le 08/02/2022
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Mieux connaître le mal, pour mieux le combattre. Tel est le principe qui anime Orgapred, la plateforme de recherche spécialisée en oncologie de l’université de Caen Normandie. Vendredi dernier, Journée mondiale contre le cancer, Orgapred était à l'honneur. Il faut dire que son activité, aussi prometteuse qu'insolite, suscite beaucoup d'espoirs. La plateforme est en effet spécialisée dans la production de mini-tumeurs cancéreuses. Ces modèles vivants ont plusieurs vocations : ils permettent de prédire la réponse des patients cancéreux aux traitements médicaux, mais aussi d’évaluer l’action d’une molécule pharmaceutique et de valider de nouvelles stratégies thérapeutiques. Les tumoroïdes, comme les appellent les chercheurs, sont des structures multicellulaires tridimensionnelles obtenues directement à partir d’échantillons tumoraux de patients, qui reproduisent de façon fidèle les caractéristiques histologiques et moléculaires de la tumeur dont ils dérivent. Ces organoïdes (structure multicellulaire tridimensionnelle qui reproduit in vitro la micro-anatomie d'un organe) ont des caractéristiques et des fonctions qui reflètent presque parfaitement la complexité du vivant. Pour aboutir à cet objet de recherche élaboré, il aura tout de même fallu un peu de temps. Sa mise au point, commencée en 2017 au sein de l’unité de recherche ANTICIPE, a permis, au terme de trois années de travaux, la mise au point des méthodes de culture, d’analyse et de conservation de mini-tumeurs de l’ovaire. Un savoir-faire original, très vite remarqué par la communauté scientifique, qui donne l’idée de lancer une plateforme dédiée à la production d’organoïdes tumoraux. C’est ainsi qu’Orgapred est créée à Caen en 2020 avec déjà au catalogue une quarantaine de lignées d’organoïdes dérivés de tumeurs de cancers de l’ovaire, des voies aérodigestives supérieures, du côlon, du pancréas et du sein. Depuis, la « fabrique à tumoroïdes » multiplie les cancers, au rythme des besoins de la recherche en oncologie. Pour qu'un jour, peut-être, les tumeurs ne soient plus que des modèles de laboratoire…

Didier Doukhan

Source : Le Quotidien du Pharmacien