Cas de comptoir
Le contexte :
M. , 28 ans : « J’ai entendu dire qu’on pouvait être vacciné en pharmacie. Je pars au Pérou dans 2 mois, pouvez-vous me vacciner contre la fièvre jaune ? »
Votre réponse :
« Nous pouvons prescrire et administrer les vaccins recommandés à partir de 11 ans, mais pas encore les vaccins du voyageur. De plus, le vaccin contre la fièvre jaune est disponible uniquement en centre de vaccination. Vous devrez vous faire vacciner au plus tard 10 jours avant de partir. »
Définitions
- Arthropodes : invertébrés au corps formé de segments articulés regroupant les arachnides, les myriapodes, les crustacés et les insectes.
- Anophèles : moustiques vecteurs du paludisme piquant habituellement entre le coucher et le lever du soleil.
- Aedes : moustiques dont les espèces Aedes ægypti et Aedes albopictus (moustique-tigre) sont vecteurs de la dengue, du virus Zika, du chikungunya et de la fièvre jaune. Les Aedes sont des piqueurs diurnes, principalement en début et fin de journée.
- Endémie : présence habituelle d'une maladie dans une région déterminée.
- Syndrome de Guillain-Barré : atteinte des nerfs périphériques caractérisée par une faiblesse voire une paralysie progressive, débutant le plus souvent au niveau des jambes et remontant parfois jusqu’à atteindre les muscles de la respiration.
Des pathologies en fonction de la destination
Le paludisme, première maladie parasitaire au monde
Le paludisme touche environ 250 millions de personnes et est responsable de 600 000 décès par an dans le monde. Il est dû à un parasite nommé Plasmodium, dont l'espèce la plus fréquente, mais aussi la plus grave, est Plasmodium falciparum. Ce parasite est inoculé à l'homme par la piqûre d'un moustique femelle du genre Anopheles lui-même infecté par un Plasmodium. Il existe également une transmission interhumaine d'une femme enceinte à son bébé ou lors d'une transfusion sanguine. Les zones à risque pour les voyageurs sont les zones tropicales d'Afrique, d'Amérique du Sud et d'Asie.
Le paludisme se manifeste environ 10 à 15 jours après la piqûre par de la fièvre qui peut s'accompagner de frissons, de maux de tête, myalgies et troubles digestifs. Dans les formes sévères, des difficultés respiratoires, des saignements ou encore des convulsions peuvent survenir et engager le pronostic vital.
Une chimioprophylaxie antipaludique est fortement recommandée, malgré l’absence de remboursement par l’assurance-maladie (association atovaquone-proguanil ; doxycycline ; méfloquine). Elle vise essentiellement à prévenir le paludisme à P. falciparum, transmis aux voyageurs majoritairement en Afrique subsaharienne.
La présence de fièvre jaune conditionne l'entrée dans certains pays
Le virus de la fièvre jaune est transmis à l'homme par la piqûre de moustiques, notamment du genre Aedes. L'OMS estime à 200 000 le nombre de personnes touchées par an dans le monde (dont 30 000 décès). L'infection peur rester asymptomatique. Sinon, elle peut entraîner après une incubation de 3 à 6 jours un syndrome grippal (fièvre, frissons, douleurs musculaires, maux de tête). Des formes sévères peuvent se développer au bout de quelques jours, après une phase de rémission passagère, et provoquer un syndrome hémorragique avec jaunisse, troubles rénaux et convulsions. Dans ce cas, l'infection est mortelle dans 20 à 60 % des cas.
La fièvre jaune est endémique en Afrique, en Amérique du Sud et en Amérique centrale. Le vaccin contre la fièvre jaune doit être réalisé en centre de vaccination antiamarile et est exigé par certains pays pour entrer sur le territoire.
Dengue, chikungunya et fièvre Zika
La dengue, le chikungunya et la fièvre Zika sont dus à des arbovirus transmis par la piqûre d'un moustique du genre Aedes dont le moustique-tigre (ou plus rarement d'une femme enceinte à son bébé ou lors d'une transfusion). Lorsqu'elles sont symptomatiques, ces pathologies entraînent un syndrome grippal avec fièvre, maux de tête, douleurs musculaires et articulaires et peuvent être à l'origine d'une éruption cutanée. Tandis que la dengue peut parfois être à l'origine de formes sévères hémorragiques ou avec un syndrome de choc, la fièvre Zika peut, elle, être à l'origine de complications neurologiques et auto-immunes sévères comme le syndrome de Guillain-Barré mais aussi d'anomalies congénitales chez les nouveau-nés.
La dengue et le chikungunya se retrouvent en zone intertropicale mais aussi en zone tempérée comme en France métropolitaine. Quant à la fièvre Zika, elle touche principalement l'Amérique latine et les Antilles.
Les tiques, présentes dans le monde entier
Les tiques sont des acariens parasites cosmopolites. Selon les continents, elles peuvent transmettre de multiples pathogènes (viraux ou bactériens) pouvant entraîner des maladies comme la borréliose de Lyme (en Europe et Amérique du Nord), des rickettsioses, des encéphalites virales ou encore des fièvres hémorragiques.
L'enfer des punaises de lit
Les punaises de lit sont des insectes parasites se nourrissant de sang humain. Présentes notamment dans les lieux ayant un taux de rotation de personnes élevé (locations de meublés, hôtels…), elles sont en forte expansion au niveau mondial car elles se transportent facilement d'un lieu à un autre. En journée, elles se cachent dans les recoins sombres des chambres à coucher, salons, fissures du plancher, plinthes… et sortent la nuit pour piquer.
Elles ne transmettent pas de maladie mais leur salive est allergisante. Aucune prévention n'est réellement efficace.
Conduite à tenir
Bien s'informer avant de partir
Il est indispensable de s'informer sur les conditions sanitaires d'un pays avant de voyager, de savoir si des vaccins sont nécessaires… Le site internet diplomatie.gouv.fr permet par exemple de consulter pour chaque pays une page de conseils incluant les formalités et démarches nécessaires, les précautions à prendre, les événements à signaler… De plus, chaque voyageur peut s'inscrire sur le « Fil d'Ariane » afin de recevoir durant son voyage des e-mails ou SMS d'informations et de consignes de sécurité si la situation du pays le justifie (fildariane.diplomatie.gouv.fr).
Autre site internet intéressant, celui de l'Institut Pasteur, qui référence par pays les vaccinations recommandées ainsi que la présence ou non de paludisme (pasteur.fr/fr/centre-medical).
Bien se protéger des moustiques
Les principes de base de protection contre les moustiques doivent être rappelés aux patients : port de vêtements couvrants et de chaussures fermées, utilisation d'une moustiquaire la nuit (qui doit toucher le sol ou être bordée sous le matelas) et mise en marche si possible de la climatisation ou d'une ventilation (cela a tendance à diminuer l'agressivité des moustiques). De plus, il faut éviter de laisser de l'eau stagnante dans des récipients car cela leur sert de sites de reproduction.
Attention à la fièvre au retour d'un voyage
Voici un principe de base à retenir pour les voyageurs : toute fièvre au retour d'un voyage en zone impaludée, et ce quels que soient les symptômes associés, doit être considérée comme étant d'origine palustre jusqu'à preuve du contraire et nécessite donc une consultation en urgence.
Toute fièvre au retour d'un voyage en zone impaludée doit être considérée comme étant d'origine palustre jusqu'à preuve du contraire. C’est une urgence
Pour retirer une tique
Une tique doit être retirée si possible dans les 12 à 24 heures après la piqûre en utilisant un tire-tique de taille adaptée en la dévissant. Aucun produit ne doit être appliqué auparavant sur la tique (ni éther ni désinfectant) car cela risque de la faire régurgiter et donc de transmettre les pathogènes potentiellement présents dans sa salive.
Après extraction, le point de piqûre doit être désinfecté et surveillé pendant plusieurs semaines afin de s'assurer de l'absence d'apparition d'un érythème migrant (plaque rouge inflammatoire dont la bordure en forme d'anneau est plus rouge que le centre assez clair).
Les bons gestes pour éviter de ramener des punaises de lit
Le transport dans ses bagages de punaises de lit étant chose aisée, certaines mesures permettent de limiter la contamination de son intérieur. Au retour, mieux vaut isoler les bagages dans des sacs plastiques sur une surface carrelée. En cas de doute, il convient d'aspirer minutieusement ses affaires puis de nettoyer le conduit de l'aspirateur car les punaises peuvent ressortir et de jeter le sac à l'extérieur.
Les vêtements doivent être lavés à 60 °C ou on peut avoir recours à un nettoyage vapeur à 120 °C. Si cela n'est pas suffisant, un traitement chimique devra être mis en place par un professionnel spécialisé.
60 °C C’est la température à laquelle les vêtements doivent être lavés au retour d’un voyage à risque de punaises de lit
Les produits du conseil
Les répulsifs
Les produits répulsifs, ou insectifuges, peuvent être proposés sous forme de sprays, lotions, laits… à base de DEET (concentration efficace minimale : 10 à 25 %), d'IR3535 (10 à 20 %) ou encore d'icaridine (10 à 20 %). Certains proposent une formulation basée sur des huiles essentielles… Mais dans ses recommandations sanitaires aux voyageurs 2024, le Haut Conseil de la santé publique (HCSP) rappelle que les bracelets antimoustiques et les huiles essentielles (y compris à base de citronnelle), mais aussi les appareils sonores à ultrasons, la vitamine B1, l’homéopathie, les rubans, papiers et autocollants gluants sans insecticide ne sont pas recommandés car leur efficacité ou leur innocuité ne sont pas démontrées. Certaines HE sont photosensibilisantes. De même, selon le HCSP, l’imprégnation des vêtements par la perméthrine n’est plus recommandée en raison d’un rapport bénéfice/risque défavorable.
L’imprégnation des vêtements par la perméthrine n’est plus recommandée en raison d’un rapport bénéfice/risque défavorable
Les moustiquaires
La moustiquaire est un indispensable des voyages en zones à risque, et peut être déjà imprégnée.
Les tire-tiques
Les tire-tiques les plus courants se présentent sous forme de petits crochets, souvent disponibles de différentes tailles dans le même kit pour s'adapter à la tique à enlever : Tire-Tic de chez Clément Thékan par exemple. Mais il existe aussi des tire-tiques électriques comme l'Elec-Tick de Biocanina qui envoie également des impulsions électriques pour désorienter la tique avant son extraction à l'aide d'un crochet.
Du tac au tac
- « J'ai entendu dire qu'il y avait un vaccin contre le paludisme, est-ce vrai ? »
- Le seul vaccin disponible contre le paludisme est le « RTS-S ». Il ne cible que le Plasmodium falciparum et est recommandé par l'OMS pour la prévention du paludisme à P. falciparum chez les enfants vivant dans des zones d'endémie palustre.
- « Je pensais acheter les antipalustres sur place, il paraît qu'ils sont moins chers à l'étranger. »
- Je vous conseille de les acheter en France avant de partir, il existe un risque important de contrefaçons dans certains pays.
- « Je suis enceinte, puis-je me faire vacciner contre la fièvre jaune ? »
- Non car il s'agit d'un vaccin vivant atténué. Il serait préférable de différer votre voyage.
- « Puis-je mettre de la crème solaire et du répulsif moustiques ? »
- Oui. Appliquez votre crème solaire et attendez 20 minutes avant d'appliquer le répulsif.
Points clés
- Le paludisme est transmis par la piqûre de moustiques Anopheles qui ont une activité nocturne.
- Les moustiques du genre Aedes ont une activité diurne et peuvent transmettre la fièvre jaune, la dengue, le chikungunya et la fièvre Zika.
- Les tiques peuvent transmettre différentes pathologies selon les zones géographiques.
- Les punaises de lit ne transmettent pas de maladie mais leur salive est allergisante.
- La protection contre les moustiques passe par le port de vêtements couvrants et de chaussures fermées et par le fait de dormir sous une moustiquaire.
- Les tiques doivent être retirées à l'aide d'un tire-tique, sans appliquer de produit au préalable.
- Le transport passif de punaises de lit étant fréquent dans les bagages, il convient de les inspecter à son retour.
- Les répulsifs recommandés par les autorités de santé sont ceux à base de DEET, d'IR3535 et d'icaridine.
Une épidémie de chikungunya à La Réunion et à Mayotte
Une épidémie de chikungunya est en cours à la Réunion et à Mayotte. Pour la contrer, une campagne de vaccination avec le vaccin vivant atténué Ixchiq avait commencé au début du mois d'avril. Elle ciblait les personnes de plus de 65 ans, celles de 18 à 64 ans avec comorbidités ainsi que les professionnels impliqués dans la lutte antivectorielle. Mais suite à la survenue d'effets indésirables graves et de plusieurs décès, le vaccin Ixchiq est désormais contre-indiqué chez les personnes de plus de 65 ans.
Testez-vous
1. Quelles affirmations sont vraies au sujet des anophèles ?
a) Les femelles piquent en journée ;
b) Elles peuvent transmettre le paludisme ;
c) Elles peuvent transmettre la fièvre jaune.
2. Concernant la fièvre jaune, quelles affirmations sont vraies ?
a) Le vaccin contre la fièvre jaune est un vaccin vivant atténué ;
b) Un certificat de vaccination anti-amarile est exigé pour entrer dans certains pays ;
c) Elle n'est endémique qu'en Afrique.
3. Quelles complications peut entraîner la fièvre Zika ?
a) Des formes hémorragiques ;
b) Un syndrome de Guillain-Barré ;
c) Des anomalies congénitales chez le nouveau-né.
4. À propos des punaises de lit, quelles affirmations sont vraies ?
a) Elles peuvent être transportées dans les bagages ;
b) Elles piquent le jour ;
c) Elles peuvent être détruites par un nettoyage vapeur à 120 °C.
5. Quelles précautions doivent être prises en zone impaludée ?
a) Porter des vêtements couvrants ;
b) Dormir sous une moustiquaire ;
c) Utiliser un répulsif antimoustiques.
Réponses : 1. b) ; 2. a) et b) ; 3. b) et c) ; 4. a) et c) ; 5. a), b) et c).
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