Portrait

Victoria Cosso, du circuit mondial de tennis à la pharmacie

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Publié le 02/10/2025
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À 34 ans, Victoria Cosso, ancienne joueuse de tennis de très haut niveau, est une pharmacienne spécialisée en nutrition et micronutrition à Marignane, dans les Bouches-du-Rhône. Aujourd’hui, elle met son expérience au service des sportifs pour prévenir les risques d’une pratique intense sur la santé.

Son passé de joueuse professionnelle lui permet de mieux comprendre les besoins des sportifs

Son passé de joueuse professionnelle lui permet de mieux comprendre les besoins des sportifs
Crédit photo : Sylvain Labaune

À deux ans et demi, raquette à la main, Victoria tapait déjà dans la balle. Une entrée en scène précoce, favorisée par un père professeur de tennis. Très vite, elle montre des prédispositions et prend le chemin du haut niveau. « J’ai été déscolarisée à partir de 10 ans pour pouvoir m’entraîner suffisamment. J’ai fait tout le circuit mondial junior puis le circuit professionnel jusqu’à mes 22 ans », explique-t-elle.

Classée 172e mondiale début 2013, elle est alors la 12e meilleure joueuse française. Mais tout s’arrête brutalement cette même année : une fracture au poignet et une opération qui se passe mal ont eu raison de son rêve d’atteindre le plus haut sommet du tennis mondial. « Je me suis blessée en février. En juin, à 22 ans, j’ai compris que je ne rejouerais probablement jamais. »

La jeune femme doit donc se réorienter. Elle n’a alors qu’un bac en poche. « J’avais d’abord en tête de devenir kiné car il y avait un lien direct avec le sport de haut niveau. Finalement, je me suis rendu compte que je détestais l’anatomie tandis que j’adorais la chimie organique. J’ai donc choisi la pharmacie, sachant que ma mère est pharmacienne et que j’avais déjà un pied dans cet univers », explique-t-elle.

Victoria a obtenu du premier coup son billet d’entrée à la faculté de Marseille, après une première année de PACES réussie. « Comparé au sport de haut niveau, ce n’était pas si difficile. C’était même moins compliqué au niveau du stress. » « Ce qui m’a beaucoup aidé, c’est d’avoir été habituée à étudier toute seule depuis toute petite, le soir, après 8 heures d’entraînement. Je n’avais que deux heures et il fallait que je sois la plus efficace possible », se souvient-elle. En 2019, Victoria soutient une thèse en lien direct avec son ancien sport, plus précisément sur la manière dont certains compléments nutritionnels (à base d’acides aminés ramifiés) peuvent réduire la fatigue nerveuse pendant un match de tennis.

Un suivi personnalisé de sportifs

Victoria est installée depuis 2021 à la pharmacie des Écoles, à Marignane, où elle exerce aux côtés de sa mère. Elle propose un accompagnement en nutrition et micronutrition pour les sportifs, qu’ils soient professionnels ou amateurs, en parallèle de l’activité classique de l’officine. Elle suit aussi bien des tennismen que des triathlètes, des rugbymen ou des footballeurs. Certaines personnes viennent également la voir pour un rééquilibrage alimentaire en lien avec une pathologie, comme le diabète.

Avec ses patients sportifs, elle élabore un programme annuel en fonction des grandes échéances. « Chez un triathlète, on va par exemple limiter l’acidose en agissant sur l’équilibre acido-basique. En cas de tendinites à répétition, je conseille un certain type de collagène pour renforcer les articulations et les tendons », détaille-t-elle.

Aujourd’hui, la nutrition et la micronutrition du sport représentent une grosse part de son activité. « Tous les jours, des patients viennent me voir pour avoir un conseil ou un suivi… »

Prévenir l’apparition de maladies auto-immunes

Victoria alerte sur les effets délétères du sport de haut niveau, notamment au tennis. Son passé de joueuse professionnelle lui permet de mieux comprendre les besoins des sportifs, après avoir souffert de blessures dans sa chair. « Au tennis, l'effort est court mais très intense. Le corps redistribue l’oxygène prioritairement vers les muscles, au détriment de l’intestin », explique Victoria. « Cela crée des zones d’hypoxie intestinale qui se nécrosent quand l’effort est répété. » À terme, cela peut engendrer une hyperperméabilité de la paroi intestinale, un terrain propice à l’inflammation chronique et au développement de maladies auto-immunes.

Pour prévenir ces déséquilibres, Victoria recommande notamment une supplémentation en glutamine, un acide aminé connu pour ses propriétés réparatrices sur la muqueuse intestinale. « C’est une des premières choses à mettre en place pour “cimenter” l’intestin et éviter que les troubles s’installent. » Victoria souffre aujourd’hui de deux maladies auto-immunes : la maladie de Crohn et une spondylarthrite ankylosante. « Je suis convaincue que ma pratique du sport de haut niveau a favorisé leur apparition, combinée à des antibiothérapies répétées pendant mon enfance sans prise de probiotiques », estime-t-elle. « Malheureusement, à l'époque où je jouais, je n’avais pas accès aux connaissances actuelles en nutrition et micronutrition. Cela aurait pu m'éviter de nombreux problèmes de santé », regrette-t-elle.

Aujourd’hui, la jeune femme souhaite faire de la prévention pour éviter que d’autres sportifs souffrent de complications. C’est tout le sens qu’elle entend donner à son métier. Cet engagement, Victoria compte le renforcer en 2026 en passant un DU de micronutrition qui lui permettrait de proposer des consultations dans son officine.

 

 

Sylvain Labaune

Source : Le Quotidien du Pharmacien