Une progression préoccupante

Méningite à méningocoque C : informer et rassurer les parents

Publié le 04/07/2016
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Depuis la mise en place de la vaccination contre le méningocoque C, la couverture vaccinale en France est restée notoirement insuffisante et n'a pas atteint les taux nécessaires à l'obtention d'une immunité de groupe pour protéger les jeunes nourrissons avant l'âge d'un an, et ceux âgés de plus d'un an non encore vaccinés.
méningite

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Crédit photo : Phanie

 Depuis la vaccination large des nourrissons contre Hæmophilus influenzae, les deux bactéries le plus souvent en cause dans les méningites bactériennes aiguës chez l'enfant sont le pneumocoque et le méningocoque. Ce dernier reste le germe le plus redouté chez la population jeune, il peut être à l'origine de cas groupés ou de situations d'hyperendémies en France. Le risque de transmission ne concerne que les sujets ayant été en contact direct avec un malade dans les dix jours précédant l'apparition des symptômes.

En dépit d'un traitement, 5 à 10 % des patients décèdent dans les 24 à 48 heures ; en l'absence de traitement, c'est une maladie mortelle dans la moitié des cas. D'où l'importance de la mise en œuvre de mesures préventives dans l'entourage proche des patients. Les sérogroupes de méningocoques les plus fréquents en France sont le B et le C. Depuis 2010, le vaccin conjugué contre le méningocoque C est recommandé et remboursé chez tous les enfants, adolescents et jeunes adultes. En pratique, une dose est recommandée pour tous les nourrissons à l'âge de 12 mois. L'extension de cette vaccination systématique jusqu'à l'âge de 24 ans révolus est aussi recommandée avec une dose de vaccin.

Malgré ces recommandations, à peine 70 % des 24 mois et 6,6 % des 20-24 ans avaient reçu le vaccin à fin 2015. Aussi, on observe une augmentation des méningites à méningocoques C chez les moins d'un an et les personnes non vaccinées. « Il faut impérativement que nous progressions dans la vaccination des adolescents et des adultes jeunes, population difficile à capter, s'inquiète le Pr Mohamed-Kheir Taha, de l'Institut Pasteur. Pour améliorer la situation, il faut profiter de toutes les occasions propices pour aborder la question et vérifier le calendrier vaccinal : visites médicales pour un certificat de sport, pour la préparation d'un voyage ou pour une maladie intercurrente. » Le Pr François Bricaire (hôpital Salpêtrière de Paris) explique cette démobilisation croissante d'une partie de la population vis-à-vis de la vaccination par la conjonction de deux situations. « D'une part le manque d'information, voire la désinformation du public par des messages relayés sur les réseaux sociaux qui sèment le doute sur la légitimité des vaccins. »

Former le corps médical sur les vaccins

Le professeur pointe également du doigt l'implication insuffisante de certains médecins dans la vaccination large de la population. « Les réticences, voire l'opposition, d'une partie du corps médical ont des répercussions sur les patients qui suivent l'avis de leur médecin. L'insuffisance de formation des médecins dans ce domaine est en partie responsable de cette situation. Certaines facultés essaient de lutter contre cette carence en consacrant davantage de place à l'immunologie et à la vaccinologie dans leurs programmes, et ce dès la première année du cursus universitaire. » Le spécialiste envisage même que la vaccination soit expliquée aux enfants dès l'école comme on les informe sur les dangers du tabac et sur l'importance de bien manger et bien bouger. Le sociologue Frédéric Pierru met en cause la dimension politique du débat ; pour lui le vaccin a perdu son aura pastorienne, c'est le monde de Pasteur contre le monde de l'industrie. « On assiste à une montée en puissance de la défiance de la population vis-à-vis de la communauté scientifique et de nombreux domaines de la thérapeutique dont la vaccination. » Le sociologue évoque aussi la génération « bio Bobo » dont l'idée est de revenir à un mode de vie naturel et de rejeter tout ce qui est issu de la chimie et qui peut polluer un corps sain. Les grandes épidémies ont disparu et si les bénéfices sanitaires des vaccins ne sont pas aussi visibles qu'au temps de Pasteur, ils sont tout aussi réels.

L'ensemble du corps médical, médecins et pharmaciens, doit rester en première ligne pour relayer cette information avec des explications claires et validées. Pour rassurer les patients, il ne faut pas hésiter à aborder tous les sujets qui les inquiètent du fait des messages dissonants qui circulent. Acteur de la prévention, le rôle du pharmacien pour lever les réticences est tout à fait d'actualité puisque, selon une récente enquête, les Français lui font confiance et sont demandeurs de nouvelles prestations à l'officine.

D'après une conférence de presse de Pfizer.

Christine Nicolet

Source : Le Quotidien du Pharmacien: 3279
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