Commandé fin 2020 par Olivier Véran afin d'identifier les manquements lors du début de la crise du Covid-19, un rapport de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) a été révélé par « Le Parisien ». Il pointe de graves dysfonctionnements au sein des instances sanitaires, tant en termes d'effectifs que d'organisation.
Fort de plus de 200 pages, le rapport a été construit sur les interviews de 375 personnes (préfets, élus, membres de cabinets ministériels, directeurs d'agences régionales de santé, mais aussi d'hôpitaux) par des inspecteurs de l'IGAS. Son constat est sans appel : la France a complètement manqué son début de gestion de la crise, faute d'organisation.
Ainsi, selon « Le Parisien », en février 2020, au tout début de l'épidémie de Covid en France, le centre de crise sanitaire récemment créé « s’apparente à un esquif ne tenant la mer que grâce à des renforts massifs de volontaires ». Des volontaires qui seront recrutés à la va-vite, sans se soucier de leurs compétences, certains moins de 24 heures avant la désignation du Covid comme « pandémie mondiale » par l'Organisation mondiale de la santé. Un retard à l'allumage et une absence d'anticipation qui auront des conséquences pour les Français, avec des recommandations trop tardives, trop nombreuses, et parfois contradictoires.
Les quelques personnes compétentes, elles, sont complètement dépassées. Ainsi, le Centre opérationnel de régulation et de réponses aux urgences sanitaires et sociales (Corruss) ne comptait que 11 agents avant la crise du Covid, habitués à gérer des crises de plus petite échelle (dengue, chikungunya, canicule). Le rapport pointe également l'activation bien trop tardive (le 17 mars, jour du premier confinement) de la cellule interministérielle de crise.
Les organisations chargées de gérer la pandémie - activées bien trop tard, en petit nombre et inadaptées au défi - n'ont pas su s'organiser convenablement. Le rapport affirme ainsi que, sur l'organisation de la gestion de la crise, « aucun acteur rencontré n'a semblé en avoir une vision claire et exhaustive, quel que soit son niveau hiérarchique. Ce manque de vision d'ensemble a mené à des activités conduites en doublon, mais aussi à l'absence de prise en charge de certains sujets ». Premières victimes de ce chaos, les EHPAD, qui, selon le rapport de l'IGAS, ont été tout simplement oubliées dans le dispositif du centre de crise sanitaire. Autre symbole de cette absence de vision d'ensemble, 25 organigrammes différents ont été comptabilisés entre début mars et début juin.
La gestion catastrophique des masques a été une autre répercussion de ce pilotage à vue. Si c'est l'agence Santé publique France qui est censée s'occuper de l'acquisition, de la fabrication, de l'importation, du stockage et de la distribution de ces derniers, son sous-dimensionnement aurait mené l'État à créer une cellule logistique interministérielle (CCIL). Las, les relations entre les deux organisations, rapportées comme très conflictuelles, entraîneront des prises de décisions à rebours, parfois contradictoires, ou en doublon, aux conséquences bien connues.
Ce rapport, versé à l'enquête de la Cour de justice de la République (CJR) - qui enquête sur la responsabilité des membres du gouvernement et a mis en examen Agnès Buzyn pour « mise en danger de la vie d'autrui », puis placé Édouard Philippe comme témoin assisté - permettra peut-être le lancement du chantier nécessaire à la réorganisation de cette usine à gaz qui, deux ans plus tard, ne semble pas encore avoir été lancé.
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