Un rapport de l’IGAS et de l’IGF prône une réforme en profondeur des ALD. Si les patients atteints de pathologie chronique seront les premiers à payer le prix des recommandations, les pharmaciens devront jouer les contrôleurs et assumer les mécontentements.
C’est un dossier sensible que laisse le gouvernement démissionnaire à son successeur. Un rapport des Inspections générales des affaires sociales (IGAS) et des finances (IGF) commandé en novembre 2023 par Élisabeth Borne alors Première ministre, remis en juin et rendu public le 4 septembre, prône une réforme de l’affection de longue durée (ALD) pour réaliser des économies, « si possible dès 2025 ». Pas le choix : « Les pistes d’économies à court et moyen termes sont limitées sauf à dénaturer le dispositif ALD, et engendrent un report direct ou indirect (via les primes des complémentaires santé) vers les assurés », estiment les inspecteurs qui visent entre 540 M€ et 870 M€ d’économies en 2025 et jusqu’à 3,4 Md€ en 2027.
En point d’orgue, la mission recommande d’actualiser la liste des ALD mais aussi d’en « clarifier les contours, adapter la couverture sociale à la gravité des pathologies et des besoins des patients, et renforcer la prévention » et pour cela, casser la classification actuelle pour introduire une hiérarchie des ALD : « Le niveau 1 constituerait un nouveau niveau de reconnaissance en ALD permettant d’accompagner les patients atteints d’une ALD de moindre sévérité et sans traitement très coûteux, mais susceptible d’évoluer vers une forme grave et coûteuse ; le niveau 2 serait centré sur les formes les plus sévères des pathologies et les traitements particulièrement intensifs ou coûteux », expliquent sans complexe les inspecteurs.
Conséquences directes pour les pharmaciens : « Le premier niveau de reconnaissance n’entraînerait plus d’exonération de ticket modérateur pour l’ensemble des soins en lien avec l’ALD, mais une exonération ciblée sur certains actes préventifs (bilans réguliers, éventuellement des actes actuellement non remboursés comme l’activité physique adaptée, etc.) », pointent les auteurs.
Autre piste, la suppression de l’exonération de ticket modérateur sur certains actes et produits est envisagée. Dans le viseur : les médicaments à service médical rendu faible (remboursés à 15 %), pour une économie estimée à 90 M€, ou les thérapeutiques non spécifiques à la pathologie, avec une économie de « 33 M€ pour l’exemple du seul paracétamol ». Est envisagée aussi la création d’un ticket modérateur (de 1 ou 5 points, avec plafond) sur les dépenses en lien avec les ALD tout en reconnaissant que la mesure « peut générer d’importantes économies mais rompt avec le principe du régime ALD ».
L’idée est aussi de simplifier les règles de gestion. Et pour cela, pourquoi ne pas s’appuyer sur le pharmacien pour faire respecter l’ordonnance bi-zone ? La vérification serait automatique au moment de la délivrance, via les LGO, et s’appuierait sur les listes négatives ou positives de produits de santé en lien avec l’affection. Le « rendement » calculé est compris entre 140 et 300 M€ d’économies sur le champ du médicament, mais la mesure implique des évolutions informatiques et réglementaires et ne pourrait être mise en œuvre qu’en 2026 ou 2027.
Pour l’association de patients France Assos Santé, ce sont des solutions de facilité : « Les personnes en ALD sont celles qui accusent déjà le plus de reste à charge. »
En 2021, 13,7 millions de personnes, soit 20 % de la population, étaient reconnues en ALD.
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