Les récents progrès scientifiques (données génomiques, biomarqueurs, intelligence artificielle…) ont grandement amélioré la compréhension de la génétique des cancers et ont également permis de mieux évaluer les facteurs de risque non génétiques : mode de vie (pollution, alcool, tabac, soleil, alimentation…), exposition hormonale, médicamenteuse… Mais aussi les facteurs sociaux et psychologiques.
« Nous avons aujourd’hui une vision de la carcinogenèse complètement revisitée. De plus, il existe des outils d’estimation des risques de survenue d’un cancer très en amont, ce qui permet de développer une nouvelle approche de dépistage basée sur l’estimation du risque individuel. L’adhérence aux dépistages organisés de cancer (sein, colorectal…) au niveau national étant modérée, cette approche pourrait, on l’espère, être plus efficace, souligne la Dr Suzette Delaloge. 40 % des personnes développant un cancer auraient pu être identifiées comme étant à risque augmenté dans les 5 à 10 années précédant leur diagnostic. Une approche qui a fait ses preuves est de leur proposer une stratégie amplifiée de détection et de prévention. »
Identifier les personnes à risque augmenté
Éradiquer le cancer avant qu’il ne soit cliniquement détectable est ainsi l’enjeu du programme Interception de l’Institut Gustave-Roussy, qui vise à identifier au plus tôt les personnes à risque augmenté de cancers (histoire familiale, prédisposition héréditaire, exposition forte à certains toxiques, lésions précancéreuses…), afin de leur proposer une prévention sur-mesure, de mieux les prendre en charge et de les accompagner dans leur parcours de santé (largement digital) dans le cadre d’une collaboration ville-hôpital. « Un parcours capable de diminuer la survenue de cancers graves, la mortalité spécifique et la morbidité à long terme. Notre objectif est de diminuer de 30 % l’incidence de cancers avancés », ajoute la Dr Suzette Delaloge.
Repérer les patients à risque permet de les sensibiliser et de leur délivrer une information adéquate sur des actions de dépistage et une prévention spécifique. La prévention comprend des conseils personnalisés en nutrition et en activité physique… Elle peut aussi être plus médicalisée, voire chirurgicale, comme en cas de prédisposition au cancer du sein et de l’ovaire.
De grandes études internationales sont en cours pour démontrer l’impact de cette nouvelle approche : l’étude MyPeBS sur le dépistage personnalisé du cancer du sein (plus de 50 000 participantes à ce jour), l’étude 4-in-the-lung-run qui affine le dépistage du cancer du poumon par scanner, ou l’étude LEAH qui évalue le rôle de l’ADN circulant en dépistage.