En 2022, 621 pharmaciens dispensateurs de gaz à usage médical étaient inscrits à l'Ordre, au sein des sections D et E (pour l'Outre-mer).
L'envie de découvrir une autre façon d'exercer la pharmacie.
Parmi eux, Charles, 38 ans, exerce cette activité depuis plusieurs années en tant que remplaçant, après l'avoir découverte fortuitement. « J'étais en train de préparer ma thèse. J'ai vu une annonce à la fac, et je me suis dit pourquoi pas », se souvient-il. Après une première expérience réussie, il décide de poursuivre dans cette voie et d'approfondir sa formation en oxygénothérapie, tout en acceptant en parallèle quelques remplacements en officine. Pharmacien responsable chez Air Domicile Santé, Cécile Vereecke a eu un parcours similaire : « J'avais envie de sortir de l'officine, où c'était compliqué d'évoluer. Devenir pharmacien dispensateur d'oxygène était une opportunité pour satisfaire mon envie. »
Comme Charles et Cécile, Meriem a découvert cette voie par hasard. « C'est dommage que cette activité pharmaceutique soit passée sous silence durant les études », regrette-t-elle. Depuis mars, elle partage son temps entre l'officine en début de semaine, et son poste chez un prestataire en fin de semaine : « Les contraintes horaires sont plus souples qu'à l'officine, ce qui me permet de concilier la vie professionnelle et la vie de famille. »
L'envers du décor.
L'activité de pharmacien dispensateur d'oxygène médical s'exerce au sein d'une structure dispensatrice déclarée. Les missions sont multiples, de la supervision du personnel à la traçabilité de l'oxygène et des dispositifs médicaux associés (cf. Fiche métier - Ordre des pharmaciens). « Il n'y a pas une journée comme une autre. Notre travail au quotidien est guidé par les bonnes pratiques », explique Cécile Verrecke.
Après 12 ans d'officine et un master 2 MAE (management et administration des entreprises), Marie-Laure Hardy a intégré le groupe CERP Bretagne Atlantique avec pour mission de développer l'activité respiratoire : « En me retrouvant chez un prestataire, j'ai découvert l'envers du décor. Comme beaucoup de prestataires adossés à un répartiteur coopérative de pharmaciens, nous nous comportions au départ comme un distributeur de matériel médical. » Devenue directrice de l'activité respiratoire chez Madouest, Marie-Laure Hardy reste attachée à valoriser la coopération avec ses homologues officinaux, par la formation notamment : « Lorsque j'exerçais à l'officine, j'admets que je n'étais pas à l'aise avec les prescriptions d'oxygène. Le débit/litre, le nombre d'heure, ça ne me parlait pas beaucoup. Il nous apparaît nécessaire de proposer des formations à nos clients officinaux. »
Derrière l'oxygène, des affections respiratoires.
À travers ces formations, la pharmacienne de Madouest souhaite stimuler l'intérêt des pharmaciens d'officine pour l'oxygène médical et, plus généralement, les sensibiliser à la prise en charge globale de leurs patients atteints d'une affection respiratoire telle que la BPCO : « Il y a un enjeu prioritaire de santé publique. » D'autant plus que, suite à la pandémie de Covid-19, le recours à l'oxygénothérapie a augmenté en médecine ambulatoire. « En 2020, les médecins généralistes ont été formés pour prendre en charge des infections Covid en ville. Aujourd'hui, la situation est différente, mais la moindre détresse respiratoire conduit à la prescription d'oxygène. » Pour Cécile Vereecke, le pharmacien d'officine a surtout un réel rôle à jouer en termes de repérage et d'orientation : « Si demain je reprenais du service à l'officine, je serais certainement plus sensible face à un patient qui se plaint d'essoufflement et plus prompte à l'inciter à consulter un pneumologue. »
Des relations complexes avec les confrères officinaux.
La dispensation de l'oxygène est surtout un travail d'équipe, au sein de laquelle le pharmacien est le référent. « Notre travail est de faire monter en compétence les techniciens qui se rendent au domicile des patients. Ils sont nos yeux et nos oreilles », explique Charles. Et Cécile Vereecke d'ajouter : « La coopération entre l'équipe technique et le pharmacien est essentielle. Nous prenons le relais dans les situations complexes, qu'il s'agisse d'un patient tabagique ou d'un logement insalubre. » En revanche, la communication avec les autres professionnels de santé semble encore difficile à mettre en œuvre. « Nous travaillons particulièrement bien avec les infirmiers. En revanche, l'échange avec le pneumologue se fera plus souvent par l'intermédiaire des commerciaux du prestataire », note Cécile Verrecke.
Quant aux relations avec les pharmaciens d'officine, elles sont plus ou moins complexes selon le prestataire. « Le pharmacien d'officine se sent souvent court-circuité. Il nous oppose le fait que le patient n'est pas libre de choisir son prestataire. En réalité, il serait difficile de laisser ce choix au patient, parce qu'il ne connaît pas les prestataires. D'où cette confiance apportée au prescripteur qui l'oriente vers une équipe. Par contre, nous sommes tenus d'informer le patient pris en charge qu'il peut changer de prestataire s'il le souhaite », se défend la pharmacienne d'Air Domicile Santé. Chez Madouest, pour accompagner les officinaux et les inclure dans le suivi du patient sous oxygène, Marie-Laure Hardy a mis en place une prestation technique et pharmaceutique clé en main, allant jusqu'à la facturation pour le pharmacien. Autrement dit, « ce qu'elle aurait aimé avoir lorsqu'elle était officinale ». Le pharmacien d'officine est en copie des comptes rendus rédigés pour les prescripteurs, « c'est essentiel qu'il soit informé ».