Choisir le « bon antidépresseur » grâce à l'IA

Publié le 22/06/2023
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Le Dr Talia Cohen-Solal, chercheuse et fondatrice de la start-up israélienne Genetika+, a créé une plateforme technique qui permet d'identifier, à partir d'un simple prélèvement sanguin, la réponse potentielle de celui-ci à tel ou tel antidépresseurs. Elle explique au « Quotidien » comment la réalisation de ce « cerveau en boîte » - technique de « cerveau dans une boîte de Pétri » (brain-in-a-dish)-, assistée par l'intelligence artificielle (IA), permet de prédire la réponse d'un patient à un antidépresseur.

Le Quotidien du pharmacien.- Pourquoi est-il important d'améliorer le ciblage de la prescription d'antidépresseurs en fonction du patient ?

Dr Talia Cohen-Solal.- Lors du traitement d'un patient souffrant de dépression, un médecin doit choisir parmi plus de 70 options de médicaments différentes. Chaque médicament prend 4 à 6 semaines pour être testé dans le corps du patient. Le patient perd des mois, voire des années de sa vie à chercher le bon traitement. Nous devons amener les patients au bon traitement, dès le départ, en sauvant la vie des patients, en faisant gagner du temps aux médecins et en réduisant les coûts des payeurs.

Pouvez-vous résumer le principe de ta technique mise en œuvre par Genetika+ ?

Genetika+ a développé une plateforme où, à partir d'un échantillon de sang régulier d'un patient, nous générons un « cerveau en boîte » sur lequel nous pouvons dépister tous les différents antidépresseurs pour voir lequel a le meilleur impact pour chaque patient. En utilisant l'IA, nous combinons ces informations pharmacodynamiques avec des informations pharmacocinétiques, en abordant les enzymes métabolisantes à partir de la génétique de base du patient et les antécédents du patient où nous introduisons des caractéristiques cliniques pour réduire les effets secondaires et améliorer encore les résultats pour les patients.

Quel niveau de validation votre approche a-t-elle déjà obtenu ?

Nous avons validé notre plateforme sur des échantillons cliniques de patients, où les patients avaient été suivis jusqu'à 1 an sur une séquence de différents antidépresseurs. Nous avons utilisé notre cohorte pour démontrer à quel point nous pouvions prédire la réponse d'un patient à un antidépresseur et nous avons pu le faire avec une efficacité deux fois supérieure à celle des médecins de la même cohorte clinique. Nous avons obtenu avec succès la certification CE sur la base de ces validations. En outre, Genetika+ a deux publications évaluées par des pairs, un brevet en phase nationale à travers l'Europe et les États-Unis, et a reçu deux subventions prestigieuses de la Commission européenne d'investissement et un financement gouvernemental.

Propos recueillis par Didier Doukhan

Source : Le Quotidien du Pharmacien