Difficile de se projeter quarante ans plus tard lorsque l’on commence sa vie professionnelle. Pourtant, plus que jamais, mieux vaut commencer à épargner au plus tôt, régulièrement, même si les sommes ne sont pas élevées. Et sereinement, vous aurez à loisir de les ajuster au fil du temps selon l’évolution de votre carrière et de vos projets, mais pour maintenir votre niveau de vie le moment venu, soyez prévoyant !
Multiplier les sources de revenus
Philippe Berthelot, président de la Caisse d’assurance vieillesse des pharmaciens (CAVP) et Philippe Becker, consultant au département pharmacie de Fiducial, s’accordent à dire qu’il faut étudier différentes pistes pour préparer une retraite et ne pas compter seulement sur la vente de l’officine car nul ne connaît sa valeur dans 30 ans.
L’idée de base est de diversifier les ressources futures, mais aussi de préparer le moment où les revenus vont diminuer en se constituant un patrimoine immobilier et/ou financier. Par exemple, être propriétaire de sa résidence principale, ne plus avoir un loyer à verser ou un crédit à rembourser, permet déjà une certaine tranquillité.
Souscrire des placements avec des sorties en capitaux ou en rentes, investir dans des assurances vie, acquérir une deuxième officine, sont d’autres pistes… Les cotisations de capitalisation versées par les pharmaciens sont placées (actions, obligations, investissements immobiliers) pour leur être restituées, augmentées des intérêts issus des placements, sous la forme d’une rente viagère au moment de partir à la retraite. Par ailleurs, Philippe Becker souligne le fait qu’il faut avoir à l’esprit que les cotisations versées à la CAVP sont fiscalement et socialement déductibles.
Revoir les modalités de calcul des retraites
Philippe Berthelot souhaite que les modalités de calcul des cotisations du régime complémentaire soient revues. Il estime, en effet, que le niveau des pensions n’est pas en adéquation avec les revenus des pharmaciens. Il faut revoir la structure de la cotisation complémentaire, explique-t-il, pour permettre aux pharmaciens d’avoir la meilleure retraite possible, d’autant que les pharmaciens cotisent à hauteur de 18 % environ de leurs revenus lorsque ce chiffre est de 28 % pour les salariés cadres.
Par ailleurs, chaque carrière est différente. Un pharmacien cumule plusieurs statuts : étudiant, adjoint, titulaire, associé, sans compter les titulaires qui ont commencé leur vie professionnelle dans l’industrie ou la répartition et qui se tourne vers l’officine. Cela peut donc se compliquer si vous n’êtes pas conseillé sérieusement. Pour atteindre les 43 années annoncées, il ne faudra pas de trous ni d’oublis de trimestres !
L'évolution du mode d'exercice a eu un impact
Selon Philippe Becker, les titulaires en société à l’IS cotisent moins aux cotisations TNS (travailleurs non-salariés) dans les premières années de leur carrière que ceux qui sont en nom propres ou en SNC. Indiscutablement, ce régime fiscal est le plus favorable sur ce point précis. C’est une des raisons qui fait que les professions libérales (dont les pharmaciens) se sont précipitées vers la société d’exercice libérale. Le législateur a tempéré cette ardeur en ajoutant à la base cotisable, donc la rémunération des dirigeants, une partie des dividendes. Selon les études de Fiducial, nous sommes dans un rapport de 1 pour 2. En conséquence, la cotisation CAVP en capitalisation est impactée. Qui plus est, le dispositif d’amortissement du fonds officinal va potentiellement aggraver la situation. Ces choix de gestion, qui sont respectables, ont automatiquement comme conséquence une pension plus faible. De son côté, les administrateurs de la CAVP estiment qu’il faut repenser le calcul des cotisations pour prendre en compte l’évolution des structures juridiques des officines.
La couverture dite "Madelin" et les régimes d’exonération de plus-value
Les pharmaciens font majoritairement le choix d’une protection dite Madelin pour un complément de couverture santé et d’arrêt maladie. L’attrait du régime retraite est moins marqué car la CAVP propose depuis des décennies une retraite par capitalisation. Pour donner un chiffre, en 2021, la moyenne des cotisations Madelin était de 7 500 euros par an. Quant aux régimes d’exonération de plus-value en cas de vente de l'officine et de départ à la retraite, ils ont vocation à perdurer. Pour Philippe Becker, les articles 150 OD ter/151 septies A et 238 quindecies du code général des impôts sont toujours en vigueur et rien n’indique un changement pour l’instant.
Les titulaires au crépuscule de leur carrière doivent bien anticiper les dates de cession et de liquidation de la retraite. Dans ce contexte, des rendez-vous avec un conseiller de la CAVP, puis avec son expert-comptable ou un avocat fiscaliste pour une vérification des conditions, sont indispensables pour faire les meilleurs choix.