« VIGILANCE, vigilance », alerte Christian Courcelle, pharmacien à Barlin (Pas-de-Calais), récemment retraité, mais à qui les syndicats ont demandé de continuer à suivre le devenir des pharmacies minières. La loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS 2012) a, en effet, prévu une convention d’objectifs et de gestion (COG) de transition pour « adosser le régime minier au régime général par le transfert, d’ici à la fin 2013, des activités assurantielles et d’offre de soins à la branche maladie [...] ». Cette convention entre l’État et la caisse autonome nationale de la Sécurité sociale dans les mines (CANSSM) devait être signée le 6 mars dernier. Faute d’accord avec les syndicats de mineurs, les négociations se poursuivent. En cause, notamment, le sort de trente-quatre pharmacies minières, essentiellement en Nord-Pas-de-Calais. Des rapports préliminaires prévoyaient l’ouverture bilatérale des officines libérales et minières, chacune pouvant servir les clients des autres. « La mort du quorum », affirmait Christian Courcelle, les pharmacies minières n’étant jamais entrées dans les quotas (« le Quotidien du pharmacien » du 19 mai 2011).
Le régime minier remonte au XIXe siècle, à l’époque sous forme de caisses de secours, financées par des cotisations. Ancêtre de la Sécurité sociale, il conserve son indépendance à la création du régime général, en 1945. Et, surtout, ses particularités : retraite anticipée, logement, chauffage, et, sur le plan sanitaire, remboursement des soins à 100 %, maisons médicales avec des praticiens salariés des actuelles caisses régionales (CARMI). Tous travaillent au seul service des affiliés, tout comme les pharmacies minières.
Les doutes subsistent.
La fermeture des puits, depuis les années 1960 jusqu’en 1990, entraîne le vieillissement de la population minière, « un ratio actifs/cotisants très faible », souligne le PLFSS. Le régime est condamné. Deux rapports, un de la Cour des comptes, le second du député Bur pour la ministre Roselyne Bachelot, alertent les pharmaciens de ville en prônant la « bilatéralité », pour sauver les pharmacies minières.
« Ces pharmacies sont assimilables à des services internes, elles n’ont pas vocation à servir le public », estime pour sa part Christian Courcelle. En prévoyant la fin des pharmacies minières, la COG tend à démontrer que les syndicats de libéraux auraient été entendus. Des doutes subsistent pourtant. La convention prévoit en effet le transfert vers le régime général des centres de santé (médicaux, dentaires, infirmiers, etc.), mais aussi la reprise des pharmacies minières « par cession de licence dans le cadre du code de la santé publique ». Certains estiment nécessaire l’avis des agences régionales de santé en cas de fermeture, comme pour une pharmacie de ville.
« Quelle est la nature de ces licences dont disposeraient ces pharmacies ? », s’interroge Christian Courcelle, qui rappelle « l’opacité excessive » du fonctionnement des CARMI. Pour ce responsable syndical, de tels transferts ou reprises contribueront à densifier encore l’offre officinale, « dans des communes minières à saturation puisque les pharmacies minières venaient en excédent par rapport au numerus clausus. Il ne faut pas mettre le feu aux poudres, mais rester attentifs ». Leur fermeture, au contraire, donnerait un ballon d’oxygène à des officines mal en point, ou un surcroît d’activité à d’autres, leur permettant de recruter, par exemple, d’anciens pharmaciens ou préparateurs miniers.
Les syndicats de mineurs poursuivent quant à eux les négociations et maintiennent la pression. Ils refusent l’arrêt de mort de leur régime que cette convention programme. Certains syndicalistes craignent ainsi que toutes leurs pharmacies ne soient pas reprises. Les pharmaciens libéraux n’envisagent même pas d’en reprendre une seule. Le fossé est béant.
Légende photo : La pharmacie minière de Barlin est-elle une officine ou un service interne ? (photo Gravend)
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