Art-thérapie

Poèmes sur ordonnance

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Publié le 14/10/2019
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À Bishop's Castle, petite commune située au sud de Liverpool (Angleterre), la drôle d'officine qui vient d'ouvrir ses portes mérite qu'on s'y arrête. Si vos pas vous y mènent, ne soyez pas surpris, vous n'y verrez ni médicament, ni cosmétique. Ni pharmacien d'ailleurs, car l'échoppe - La Poetry Pharmacy - est tenue par deux fous de poésie, Deborah Alma et James Sheard, qui enseignent tous deux l'écriture à l'université de Keele toute proche. Sur les rayons, seulement quelques centaines de reliures sagement alignées attendent qu'on les y prenne. « Nous pensons que la poésie peut faire beaucoup pour améliorer ou modifier un état d'esprit, qu'elle peut aider de bien des manières à conserver une bonne santé mentale. La Poetry Pharmacy est un moyen pour nous de rendre visibles les effets thérapeutiques de la poésie, en mettant l'accent sur le bien-être et l'inclusion », explique Deborah Alma. Chaque vendredi, promet-elle, les visiteurs pourront bénéficier de consultations gratuites, sorte d'entretiens pharmaceutiques (gratuits !), au cours desquels les libraires-pharmaciens conseilleront les textes et auteurs les plus adaptés à leur état. Les patients-lecteurs pourront aussi y trouver de petits flacons à médicaments « pleins de phrases parfaites qui attendent d'être dévoilées au moment où vous en avez le plus besoin ». Les mots médicaments ? Le concept a déjà été testé avec succès dans l'Hexagone. En 2009, l'association marseillaise « Et pourtant elle tourne » avait ainsi eu l'idée de mettre des poèmes en boîtes… de médicament. Et de les délivrer gratuitement dans les officines de la ville. Plus personnelle, la démarche de la titulaire Anne Provent, installée à Malakoff (Hauts-de-Seine), révélait, elle aussi, la valeur thérapeutique des mots (« Le Quotidien » du 16 juin 2016). Dans une « boîte magique », quelques mots tirés au sort étaient le prétexte à des consultations poétiques menées au sein de l'officine par une art-thérapeute. Parmi de nombreuses autres, ces expériences valident la puissance évocatrice des mots et l'efficacité de cette chimie de la langue qui n'a pas besoin d'AMM.

Didier Doukhan

Source : Le Quotidien du Pharmacien: 3548