PRIMUM non nocere. D’abord ne pas nuire, tel est l’un des principes essentiels de l’art médical. Un principe que les prescripteurs doivent avoir en tête lorsqu’ils prennent leur stylo pour rédiger une ordonnance contenant un antibiotique, comme le rappelle en substance le « Bulletin épidémiologique hebdomadaire » (BEH) du 13 novembre, consacré à la surveillance de la consommation et de la résistance aux antibiotiques. « En raison du développement de la résistance bactérienne, l’usage inapproprié des antibiotiques a des conséquences pour la collectivité tout entière », écrit ainsi Philippe Cavalié, de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM). En effet, le principal effet « indésirable » des antibiothérapies est la sélection de résistance. « Chaque gramme d’antibiotique utilisé en médecine humaine ou en médecine vétérinaire a un impact sur l’évolution de l’écologie bactérienne, sur l’émergence de résistances ! », martèle le Pr Christian Rabaud, du centre hospitalier universitaire de Nancy, et président de la société de pathologie infectieuse de langue française. Il ajoute : « la prescription d’antibiotiques reste aujourd’hui encore banalisée chez l’homme comme chez l’animal, et les Français demeurent, malgré quelques progrès, parmi les plus gros consommateurs de ce type de médicaments en Europe (trois fois plus qu’en Suisse et aux Pays-Bas. »
Une urgence absolue.
Afin de réduire la consommation, la France a mis en place, dès l’année 2000, des plans nationaux, dont le célèbre « Les antibiotiques, c’est pas automatique ». Le nouveau « plan national d’alerte sur les antibiotiques » prévoit, quant à lui, un objectif chiffré de baisse de la consommation en médecine humaine de 25 % entre 2011 et 2016. En parallèle, et pour la première fois, un plan de réduction des risques d’antibiorésistance en médecine vétérinaire a été engagé. Les premières campagnes se seraient-elles révélées insuffisantes ? Entre 2000 et 2010, « la baisse de la consommation a été importante en ville, mais son ampleur s’est atténuée, indique Philippe Cavalié. Une légère tendance à la hausse se dessine même depuis plusieurs années. » Résultat, la consommation française ambulatoire reste l’une des plus élevées d’Europe. « L’adaptation rapide des bactéries, l’émergence et la diffusion des résistances, couplées au tarissement de notre pipeline en terme de nouvelles molécules actives, nous contraignent à reconsidérer les choses et à envisager à nouveau que la mortalité par infections bactériennes puisse réaugmenter », estime le Pr Rabaud. Aussi, pour lui, « mieux prescrire les antibiotiques est devenue une urgence absolue qui doit ralentir, voire endiguer ce phénomène ».
Certes, selon une étude publiée dans le BEH du 13 novembre, la proportion de souches résistantes à la méticilline chez Staphylococcus aureus (SARM) a reculé d’un tiers entre 2001 et 2010. Mais, depuis 2005, on assiste à une augmentation inquiétante des souches résistantes aux céphalosporines de 3e génération chez Escherichia coli et Klebsiella pneumoniae. Un point positif : la résistance aux carbapénèmes est encore exceptionnelle en France dans les infections à E. coli et K. pneumoniae, contrairement à d’autres pays de l’Union européenne. Quoi qu’il en soit, pour Christian Rabaud, il n’y a qu’un seul mot d’ordre qui vaille aujourd’hui : « le juste usage des antibiotiques ». « Chaque prescription doit être réfléchie, en mettant en balance les effets bénéfiques à court terme pour le patient et les effets néfastes pour lui, mais aussi pour l’écologie bactérienne par la sélection de bactéries multirésistantes », affirme l’infectiologue.
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