DÉCIDÉMENT, Marisol Touraine aime les effets de surprise. Après avoir soutenu l’amendement autorisant la vente des tests de grossesse hors des pharmacies sans même évoquer la question avec la profession, elle propose aujourd’hui que les officinaux dispensent des médicaments à l’unité. Et là encore, les syndicats n’ont été prévenus qu’au dernier moment, à l’occasion de leur rencontre avec le directeur de cabinet de la ministre de la Santé, le 24 septembre. Pour Marisol Touraine, il s’agit avant tout de faire la chasse au gaspi. « Chaque Français, je dis bien chaque Français, pas chaque ménage, possède 1,5 kg de médicaments dans son armoire à pharmacie », insiste-t-elle. « Ce sont donc des médicaments qui soit ne sont pas utilisés, soit font l’objet d’automédication dans des conditions qui ne sont pas toujours sécurisées, je pense en particulier aux antibiotiques », explique-t-elle.
D’abord un test.
L’idée d’adapter la quantité de médicaments délivrée au traitement n’est finalement pas nouvelle. C’est pour répondre à cette logique que Xavier Bertrand, alors ministre de la Santé, avait lancé en 2006 les conditionnements de trois mois. Mais déjà, pour lui, l’adaptation de la taille aux besoins reposait également sur la mise à disposition d’emballages plus petits. Marisol Touraine va aujourd’hui plus loin en proposant la dispensation au comprimé près.
Pour l’heure rien n’est fait. Il s’agit seulement d’une mesure inscrite dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2014 qui sera prochainement débattu au Parlement. De plus, la ministre propose d’abord d’expérimenter ce principe pour certains médicaments (les antibiotiques), dans certaines régions et dans certaines pharmacies volontaires, avant d’envisager sa généralisation.
Un milliard d’économies.
En attendant, cette hypothétique dispensation à l’unité occupe l’ensemble de l’espace médiatique. Au point que l’on oublierait presque que le PLFSS pour 2014 est une nouvelle fois drastique pour l’économie de l’officine. La Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF) évalue ainsi son impact à pas moins de 10 000 euros de perte de marge par pharmacie. « En l’absence de réforme d’évolution vers l’honoraire de dispensation prévu dans la convention nationale pharmaceutique, il sera impossible aux pharmaciens d’officine de continuer à assurer, dès l’année prochaine, le service de santé de qualité que l’on attend d’eux », assure le syndicat, pour qui « un échec ou un nouveau report des négociations est inenvisageable ».
Le budget de la Sécu pour l’année prochaine mise en effet une nouvelle fois sur de fortes baisses de prix sur les spécialités pharmaceutiques, à hauteur de 960 millions d’euros. La mise en place d’une rémunération déconnectée au moins des prix, devient donc urgente.
Une accélération sans précédent.
Mais les officinaux ne sont pas les seuls à se plaindre de ce nouveau coup de massue. La Chambre syndicale de la répartition pharmaceutique (CSRP) s’alarme ainsi de ces baisses de prix massives qui visent aussi bien les produits sous brevet que les génériques. « Il s’agit d’une accélération sans précédent d’une tendance amorcée depuis dix ans qui n’est plus supportable » pour les entreprises, affirme la CSRP qui, dans ce contexte, demande une révision à la hausse de la marge des grossistes-répartiteurs. « C’est la pérennité du système actuel d’approvisionnement en médicament qui est aujourd’hui menacée », affirme-t-elle.
Tout aussi inquiets, les fabricants de génériques parlent de « mesures iniques et incohérentes ». « Ce PLFSS 2014, faisant le choix de la facilité, promet de mettre en péril le maintien de l’outil industriel du générique sur le territoire français et de fragiliser le réseau officinal », estime ainsi le GEMME, qui en vient à se demander si « la France met-elle tout en œuvre pour préserver notre système de santé ? »
De son côté, le LEEM (Les entreprises du médicament) dénonce un PLFSS « incohérent avec la politique industrielle du gouvernement ». Les industriels mettent en garde contre l’ampleur des baisses de prix qui, selon eux, vont entraîner des exportations parallèles, et donc accroître les risques de rupture d’approvisionnement.
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