DEPUIS juillet la pancarte trône devant la pharmacie : « Dizy cherche médecin ». « Je l’ai fait faire et je l’ai payé moi-même », explique Gilles Queille, titulaire à Dizy-le Gros, petite commune de l’Aisne, depuis près de trente-cinq ans, et adjoint au maire. À 59 ans, « j’ai un petit chiffre d’affaires de 750 000 euros, qui a plutôt tendance à baisser ; je me demande qui voudra prendre ma succession dans un village sans médecin. Avec le papy-boom, le nombre de pharmacies qui cherchent un repreneur est pléthorique », remarque-t-il. Depuis son arrivée à Dizy, il a connu trois médecins dans cette commune de 800 habitants, « mais, depuis 1998, c’est le vide… Et comme il n’y a pas de clientèle toute faite à reprendre, c’est encore plus difficile pour attirer un médecin », souligne-t-il. La mairie offre pourtant deux emplacements : « Je pense que les généralistes préfèrent s’installer à plusieurs. Nous avons donc aménagé plusieurs pièces dans une ancienne école. Deux dentistes rémois, présents, l’un deux jours par semaine, l’autre quatre jours, et une infirmière, déjà présents sur Dizy, vont probablement s’y installer. Il restera deux locaux vides pour des médecins. »
La commune est pourtant loin d’être en voie de désertification, avec sa boucherie, sa boulangerie, et son école de 85 places… Le nombre d’habitants a même tendance à augmenter légèrement du fait de la proximité avec la ville de Reims. Actuellement, ils parcourent donc douze kilomètres pour aller jusqu’à Sissonne, ou sept, pour Montcornet. Dans chacun de ces deux bourgs, le nombre des médecins est passé de trois… à un, alors que le nombre de patients ne baisse pas ! La demande est donc présente. « Il y a souvent une semaine d’attente pour avoir un rendez-vous », constate Gilles Queille.
Présent six jours sur sept.
Les débuts de ce confrère originaire de Dordogne ont été plutôt faciles. Arrivé à Dizy comme assistant pour aider pendant trois mois un ami rencontré sur les bancs de la faculté de Toulouse, il n’en est jamais reparti. Marié à « une fille du cru », Gilles Queille a acheté, dès 1982, la moitié des parts de la pharmacie, puis, en 2005, la totalité. « Pendant les premières années, je faisais un gros mi-temps. J’avais le temps de faire autre chose, de monter une troupe de théâtre », raconte-t-il. Désormais, il travaille six jours sur sept et s’interroge sur l’opportunité de prendre un adjoint : « J’emploie deux préparatrices et une vendeuse. Je devrais alors licencier une personne. » Les prochaines années seront donc moins agréables que les premières : « Je suis bien parti pour travailler jusqu’à 66 ans, et mes revenus sont identiques à ceux que j’avais au début de l’installation. »
Certes, il bénéficie d’une certaine qualité de vie. « Les gens sont fidèles. Ici, ce n’est pas la bousculade. J’ai le temps de parler avec eux. On vient aussi me voir pour de la bobologie », témoigne Gilles Queille, qui privilégie le contact humain et apprécie les moments de discussion au comptoir. « Les clients se rendent compte de la chance d’avoir encore une pharmacie dans le village », poursuit-il. Mais les anciens ont tendance à prendre de l’âge ! Et les jeunes sont eux moins fidèles. Autre atout : son officine est sur une route passante, l’axe Reims-Bruxelles. « Quand j’ai changé ma croix, j’ai vu la différence. J’ai eu plus de clients de passage », précise-t-il.
Désormais, l’urgence est donc de trouver un médecin. « Nous avons réfléchi à la possibilité de passer par des agences qui trouvent des médecins étrangers, roumains, espagnols… Mais le risque, c’est qu’il ne se plaise pas sans le coin et ne reste que deux ans. » Reste l’espoir d’attirer un médecin de la Belgique voisine.
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