C’EST PEU DIRE qu’Éric Vermès est autant passionné d’histoire que de sa ville : le pharmacien de Saint-Riquier, dans la Somme, est en effet né dans cette ville, où il devient pharmacien titulaire à 24 ans, en 1993, et où il est membre actif des Amis de l’Hôtel-Dieu. Cette association a entrepris de restaurer pour l’ouvrir au public une partie de cet ancien hospice, devenu hôpital, puis maison de retraite, et aujourd’hui EHPAD. Le pharmacien de ville l’est aussi des 180 résidents de l’EHPAD. Pour l’association, il a reconstitué une apothicairerie et une chambre de malade du XVIIIe siècle, occupant deux anciennes cellules monacales donnant sur le cloître.
« La léproserie date au moins de 1199, selon des écrits connus, et comptait 18 lits et 24 religieuses, précise Éric Vermès. À la Révolution, l’hospice a été agrandi en hôpital pour 60 lits, et le restera jusque dans les années 1960. C’est Michel Martin, qui travaillait au centre culturel de l’abbaye, et décédé l’an passé, qui a créé l’association, au départ pour faire visiter la chapelle et le cloître. En retrouvant trente-cinq pots de pharmacie en faïence, magnifiques, d’autres en étain, des coffres de chirurgie avec leurs instruments, on a voulu les montrer et on a installé cette apothicairerie. »
Éric Vermès va chercher à identifier les remèdes, dont les noms sont inscrits sur les pots. « Beaucoup de compositions sont à base de plantes de jardin de bonnes sœurs. Certaines sont très anciennes, comme celle attribuée au médecin de l’empereur romain Néron. Je n’ai pas encore tout trouvé la faïencerie qui a pu faire ces pots J’ai contacté les musées de pharmacie de Beaune (Côte-d’Or) et de Troyes (Aube). Eux aussi restent avec des objets non identifiés. » L’apothicairerie est complétée par des piluliers, en bois et bronze, vieux de plus de cent ans, venant de l’officine d’Éric Vermès, de dons de visiteurs, médecins, pharmaciens.
Un tableau, retrouvé dans un grenier de l’hospice et restauré, donne l’idée de reconstituer une chambre de malade. Le lit sera fabriqué par un menuisier du pays, les mannequins (un malade et une sœur) sont achetés au musée Grévin. La chambre occupe une cellule voisine de l’apothicairerie.
À la recherche des muches.
L’an passé, l’association avait recruté un jeune guide pour la saison pour faire visiter la chapelle, aux boiseries du baron autrichien et ébéniste Pfaff von Pfaffenhoffen, le cloître et les salles rappelant la fonction de l’hospice. Hors saison, les bénévoles, dont le pharmacien, se relaient pour accueillir les visiteurs.
Éric Vermès a une autre passion pour l’histoire, la découverte des « muches », des villages souterrains que les Picards creusaient dans leur sol crayeux pour se dissimuler des hordes de soldats qui ont envahi leur pays pendant des siècles. La lecture du « Quotidien du pharmacien », en mars 2004, lui fait rencontrer Bernard Petit, expert en archéologie et spéléologie en Picardie. Depuis, ils cherchent ensemble, et ont déjà mis au jour une muche de 50 pièces à Mesnil-Domqueur, à quelques kilomètres de Saint-Riquier.
Saint-Riquier est aujourd’hui un petit bourg, riche d’un patrimoine qui passionne le pharmacien. L’époque glorieuse remonte à Charlemagne (742-814), l’empereur dont le conseiller Angilbert, fin lettré, dirigeait l’abbaye de Saint-Riquier. Elle a compté jusqu’à 300 moines. Récemment, le crâne de Nithart, petit fils de Charlemagne, retrouvé dans un placard de l’abbaye et restauré, lui a été restitué par Christian Manable, président du conseil général. Il a annoncé à cette occasion un vaste projet pour l’abbaye carolingienne autour du livre et de l’histoire. Un projet qui fait briller les yeux du pharmacien, autant que l’enfant du pays.
légende : Éric Vermès, avec un de ces pots en faïence dont il cherche encore l’origine (photo Gravend)
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