Ascèse et politique

François Ruffin, nouveau député de la France insoumise, a décidé de ne garder son salaire d'élu qu'à hauteur du Smic. Loin de recevoir des tombereaux  de compliments, il a été vivement critiqué, non pas par les élus des autres partis mais par ceux du sien qui,  pour leur part, estiment qu'ils ne peuvent pas faire ce cadeau à la collectivité et refusent donc de l'imiter. L'un de ses détracteurs a même fait le calcul : journaliste et cinéaste, dont l'un des films a fait une bonne recette, M. Ruffin serait de toute façon à l'abri du besoin. Voilà comment un coup d'arrêt vient d'être mis à une dérive sociologique en vertu de laquelle les députés, enserrés dans une réglementation draconienne, sont empêchés de cumuler les mandats, de dépenser sans justifier leurs frais, d'employer des proches ou amis, et d'arborer tout signe apparent de richesse. Les voilà enfin autorisés à se payer un verre au bistrot sans avoir de comptes à rendre à leurs mandants. Les scandales innombrables qui jalonnent l'histoire de la République ont créé dans l'opinion de tels soupçons à l'égard de ceux qu'elle élit que le métier de député, brigué par tant de candidats, devient un sacerdoce accablant que tous ne veulent pas forcément partager.