Prévention et dépistage des IST

Santé sexuelle : les jeunes de moins en moins informés

Par
Publié le 27/11/2025
Article réservé aux abonnés

Les jeunes sont de moins en moins informés en matière de santé sexuelle et de prévention des IST. Les taux de positivité de certaines infections augmentent chez les moins de 25 ans, qui méconnaissent les risques et les modalités de dépistage.

consultation

Selon une étude Sidaction sur 2024 publiée en mars 2025, 42 % des jeunes pensent encore que le VIH peut se transmettre par un baiser
Crédit photo : Phanie

Alors que 17 % des découvertes de séropositivité VIH se font chez les moins de 25 ans, les jeunes sont de plus en plus en situation de méconnaissance en santé sexuelle. En France et plus généralement en Europe, l’usage du préservatif chez les adolescents recule et, par conséquent, les diagnostics de VIH et d’infections sexuellement transmissibles (IST) bactériennes augmentent.

À l’occasion d’une conférence de presse organisée par l’association HF Prévention, la Dr Claudine Duvivier, présidente de la coordination régionale de la santé sexuelle (Coress) Île-de-France Sud et infectiologue à l’hôpital Necker-Enfants malades (AP-HP) et au centre médical de l’Institut Pasteur (Paris), rapporte les derniers chiffres de dépistage d’IST en date. Bien que les infections syphilis concernent principalement les hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes, le taux de positivité chez les femmes cis, surtout les jeunes (15-25 et 26-49 ans), est en augmentation de 24 % entre 2023 et 2024. Même si le taux de positivité aux infections à chlamydia diminue, ces mêmes femmes sont particulièrement touchées.

Les LGBTphobies, le racisme, le sexisme ont une influence directe sur l’accès aux soins : les jeunes LGBTQIA+ sont quatre fois plus à risque d’IST non dépistées, la peur du jugement conduisant notamment à un renoncement aux soins et la précarité retardant la consultation. « Les chiffres démontrent une réalité : nous faisons face à une épidémie silencieuse parmi les jeunes, souvent asymptomatique et donc invisibilisée », s’inquiète la Dr Duvivier.

Les pratiques à risque augmentent depuis le Covid

Dans le cadre d’une enquête réalisée par HF Prévention auprès des personnes qu’elle a dépistées, l’association a observé une augmentation importante des prises de risques sexuels sur les cinq dernières années : + 84,79 % du multipartenariat sexuel, + 54,76 % de la consommation d’alcool ou de drogues avant un rapport, + 21,32 % de rapports de type BDSM, scatophilie, etc. « Le Covid a beaucoup changé les comportements sexuels », rapporte Thomas Louzani, responsable de la délégation Île-de-France Ouest d’HF Prévention. L’association a aussi recensé en 2024 un taux de positivité VIH d’1,39 % « jamais observé jusqu’ici à HF Prévention ».

Jean-Luc Romero-Michel, nouveau président de Sida info service et président d’honneur d’HF Prévention, alerte : « Dans la pratique du chemsex, nous faisons face à des publics très jeunes qui commandent des produits par voie postale et ne savent pas ce qu’ils reçoivent. Ceux qui utilisent des substances injectables développent souvent des abcès après injection, entre autres. »

Les jeunes ne savent pas où, quand ni comment se dépister

« La méconnaissance qu’ont les jeunes des IST est glaçante », s’alarme Jean-Luc Romero-Michel. Selon une étude Sidaction sur 2024 publiée en mars 2025, 40 % des jeunes croient qu’il existe un vaccin contre la transmission du VIH (+ 3 points par rapport à 2023), 39 % que l’on peut guérir du sida (+ 3 points) et, constat marquant une réelle régression des connaissances, 42 % pensent que le VIH peut se transmettre par un baiser.

Thibault Derbré, président du Centre LGBTQI + de Paris et d'Île-de-France, rapporte les observations de terrain de l’association : « En milieu universitaire, où nous intervenons pour des actions de prévention en santé, nous constatons une grande méconnaissance des risques voire un rejet de la santé sexuelle par les étudiants. » Pour les jeunes accueillis directement au centre, c’est une méconnaissance des lieux et modalités de dépistage.

En 2024, 90,55 % des personnes dépistées auprès de HF Prévention avaient entre 18 et 25 ans. « Les jeunes sont livrés à eux-mêmes, ils ne comprennent pas ce qu’est le VIH, ce qu’est une IST et ce que ça implique. Ils sont aussi nombreux à subir des violences sexuelles : 18 % de ceux que nous dépistons le déclarent », déplore Thomas Louzani. Jean-Luc Romero-Michel le revendique : « Les jeunes doivent pouvoir grandir avec des droits, pas avec des risques. L’accès à l’information, à la prévention et au dépistage est un droit fondamental. »


Source : Le Quotidien du Pharmacien