Portrait

Julie Napieralski : « En première ligne de l’épidémie de Chikungunya »

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Publié le 30/10/2025
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Ancienne de l’ANEPF, formée dans les institutions de santé, Julie Napieralski est aujourd’hui une officinale engagée, déterminée à jouer son rôle de professionnelle de santé derrière le comptoir autant que dans les couloirs de l’ARS. Adjointe dans une officine réunionnaise, la jeune pharmacienne s’est retrouvée en première ligne lors de l’épidémie chikungunya.

julie napieralski

Julie Napieralski, une pharmacienne très attachée au comptoir et engagée pour la santé des populations
Crédit photo : DR

« C’est mon engagement dans l’Association nationale des étudiants en pharmacie de France (ANEPF) en pleine crise sanitaire qui m’a orientée vers la santé publique. » Julie Napieralski est pharmacienne adjointe dans la pharmacie DOM, sur l’île de la Réunion. Originaire du Vaucluse, dans le sud de la France, elle a fait ses études à Marseille, filière industrie, achevées par un master Politiques publiques spécialité santé de l’École d’affaires publique de l’Institut d’étude politique de Paris. Science Po Paris, en français courant. « Au cours de mon année en tant qu’attachée de presse de l’ANEPF, j’ai rencontré l’ensemble des professionnels, j’ai pu agir pour la profession et porter la voix des étudiants en pharmacie.

En tant que future professionnelle de santé, je voulais prendre part à l’élaboration des politiques de santé

Julie Napieralski

C’était très enrichissant, d’autant plus que nous étions en pleine pandémie, se remémore la jeune pharmacienne. C’est à ce moment-là que je me suis dit qu’en tant que future professionnelle de santé, je voulais prendre part à l’élaboration des politiques de santé. » Julie Napieralski choisit alors ses stages dans ce sens. D’abord, en 5e année, à la Caisse nationale d’assurance maladie (CNAM), à Paris. « J’ai un excellent souvenir de mon stage à la mission jeune de la CNAM. Les étudiants venaient tout juste d‘être rattachés au régime général, alors il y avait un public bien spécifique vers lequel aller et pour lequel développer des actions. Nous avons produit un module sur la Sécurité sociale, sur son fonctionnement, sur ce que c’est que la carte Vitale… » Une action ciblée, qui vise à combler une lacune de l’éducation des jeunes. « Notre système de santé est une structure compliquée, qui ne nous est pourtant jamais expliquée. Pas même dans les études pharmaceutiques. Il n’y a aucun cours où l’intervenant expose simplement qui est qui et qui fait quoi, regrette l’adjointe officinale. En tant que professionnel de santé, si l’on cherche à faire faire bouger les choses, il faut d’abord savoir à quelle porte frapper… »

Départ pour La Réunion

L’année suivante, les astres s’alignent et les agendas de Julie Napieralski et de son compagnon aussi. « Alors qu’il étudiait encore à Marseille, filière officine, une année en dessous de moi, nous avons tous deux eu nos stages de fin d’études à réaliser en même temps. » Elle depuis l’Île-de-France, lui depuis la Provence, le jeune couple recherche autant une expérience de fin d’étude, qu’un lieu où se retrouver. « Nous étions d’accord pour trouver un terrain d’exercice original, pour enrichir nos parcours et voir du pays. Pour ma part, c’est dans une ARS que je cherchais un stage, pour voir comment le système de soins est organisé au niveau local et travailler sur la mise en place de politiques de santé spécifiques à un territoire, à une population. » C'est décidé, les deux pharmaciens s’envolent pour La Réunion. Les expériences y sont variées. « À l’ARS, j’ai participé à l’élaboration du Plan régional de santé (PRS), j’ai pris part à tout le processus, jusqu’à l’adoption et la publication du projet en novembre 2023 », se souvient Julie Napieralski. À l’issue de cette expérience, elle reprend le chemin du comptoir, mais, toujours engagée pour la santé des populations, conserve un lien avec l’Ordre des pharmaciens et l’Union régionale des professionnels de santé (URPS) de l’île. « Je donne des coups de main où l’on a besoin de moi et j’aide les acteurs à faire avancer plus vite les projets, se réjouit-elle. C’est l’avantage d’avoir travaillé pour les différentes institutions. »

L’épidémie de chikungunya, un baptême du feu et un événement de santé publique fondateur

 

Un appui utile, au cours de la récente épidémie de chikungunya, qui a frappé La Réunion au premier semestre 2025. « Ce n’était pas grand-chose, mais lorsque tel professionnel ne recevait par les DGS-Urgent j’ai fait le lien, j’ai aussi contacté la presse, avec qui j’avais beaucoup été en contact durant mon mandat à l’ANEPF pour amener le sujet sur le devant de la scène. Ce qui se passe dans l’océan Indien est souvent lointain pour la métropole, regrette la Réunionnaise d’adoption. Et de poursuivre, « lorsque le cyclone Garance a laissé derrière lui de l’eau stagnante partout, des fruits pourris et des déchets verts qui jonchaient les rues, nous avons constaté une explosion du nombre de moustique et il est devenu évident qu’une épidémie allait se déclarer », se remémore-t-elle. En quelques semaines à peine, l’épidémie se répand. Dans l’ouest de l’île d’abord, puis dans toutes les communes. « Certains jours, tous les patients de l’officine nous sollicitaient pour des symptômes de Chikungunya, c’était complètement fou, raconte, encore impressionnée, la jeune professionnelle de santé. Et puis la vaccination est arrivée, mais tardivement. Les gens étaient déjà malades et beaucoup ne voulaient pas du vaccin, la communication autour de celui-ci a été très mauvaise. » Cette crise sanitaire constitue dans l’esprit de Julie Napieralski un baptême du feu et un événement de santé publique fondateur dont les leçons tirées « renforcent ma volonté de retourner travailler dans les institutions. Lorsque l’on a exercé en première ligne, les décisions que l’on prend par la suite n’en sont que plus percutantes. »

Arthur-Apollinaire Daum

Source : Le Quotidien du Pharmacien