Ainsi que l’a rappelé le Pr Jean-Sébastien Hulot (Directeur du Centre d’Investigations Cliniques, Hôpital Européen Georges Pompidou, Paris), la découverte de l’effet incrétine (amplification de l'insulinosécrétion secondaire à l'administration orale d'une dose de glucose) en 1964, aboutira des années plus tard à la découverte du GLP-1 (glucagon like peptide 1), une hormone intestinale secrétée par certaines cellules de l’iléon et de son récepteur.
Des analogues du GLP-1, administrés par voie sous-cutanée, ont tout d’abord été utilisés dans le diabète de type 2, mettant à profit leurs effets métaboliques via le pancréas endocrine (augmentation de la biosynthèse et de la libération d’insuline, diminution de la sécrétion de glucagon et baisse de l’apoptose des cellules bêta des îlots de Langerhans).
Des récepteurs au GLP-1 en dehors du pancréas
Plusieurs produits ont été commercialisés successivement. D’abord l’éxénatide, puis le liraglutide-Victoza, le dulaglutide-Trulicity, le sémaglutide-Ozempic et, tout récemment, le tirzépatide-Mounjaro.
Mais la mise en évidence de récepteurs au GLP-1 en dehors du pancréas (cœur, système vasculaire, reins, cerveau – zones impliquées dans la régulation de l’appétit, tissu adipeux…) laissait penser à d’autres types d’effets éventuels, et donc d’indications, que sur la glycémie et le diabète de type 2.
De fait, l’essai STEP-1 par exemple, d’une durée de 68 semaines, a montré que le sémaglutide à la dose hebdomadaire d’entretien de 2,4 mg avait permis une perte de poids significative comparativement au placebo (15 kg vs 2,4 kg ; 86 % ont perdu au moins 5 % de leur poids initial, 69 % au moins 10 % et 51 % au moins 15 %) chez des patients non diabétiques atteints de surpoids ou d’obésité.
Un impact cardiovasculaire
D’autres études n’allaient pas tarder à ouvrir des perspectives intéressantes en matière de pathologies cardiovasculaires.
C’est ainsi que l’essai SUSTAIN 6 avait pour objectif principal de mesurer sur une période médiane de 2 ans l’impact de l’administration de sémaglutide à la dose d’entretien hebdomadaire de 0,5 ou 1 mg sur la mortalité cardiovasculaire de 3 300 patients diabétiques de type 2 de plus de 50 ans et présentant une maladie cardiovasculaire déclarée (pathologie coronaire, cérébrovasculaire ou artériopathie) ou de plus de 60 ans avec au moins un facteur de risque associé. La conclusion en a été une baisse de poids de 3,6 à 4,9 kg, une réduction de la pression artérielle systolique de 3 à 5 mm Hg et surtout une réduction significative de la survenue des événements cardiovasculaires des patients traités par rapport au groupe placebo (6,6 % vs 8,9 %), sans signal défavorable sur le plan de la sécurité.
L’étude SELECT a mis en évidence une réduction d’environ 20 % du risque d’événements cardiovasculaires majeurs
L’étude SELECT, quant à elle, menée chez des sujets non diabétiques présentant un IMC supérieur ou égal à 27 et une insuffisance cardiaque, a mis en évidence une réduction d’environ 20 % du risque d’événements cardiovasculaires majeurs (MACE – Major Adverse Cardiac Events : critère composite intégrant le décès cardiovasculaire, la transplantation cardiaque, une arythmie ventriculaire, une hospitalisation pour insuffisance cardiaque, une récidive de myocardite aigue et une hospitalisation imprévue pour raison cardiaque) avec le sémaglutide 2,4 mg (Wégovy) une fois par semaine.
Sans épuiser le sujet, citons encore les données de l’étude STEP-HFpEF qui s’est intéressée aux effets du sémaglutide sur la qualité de vie de patients insuffisants cardiaques non diabétiques et en surpoids (IMC supérieur ou égale à 30). À la semaine 52, Les résultats montrent une amélioration significative du score KCCG-CSS mesurant la qualité de vie.
La mise à disposition récente du tirzépatide apporte son lot de nouvelles données intéressantes. Rappelons à ce sujet que le tirzépatide exerce un double mécanisme d’action, avec la particularité d’activer non seulement les récepteurs au GLP-1 mais aussi ceux au GIP (polypeptide insulinotrope dépendant du glucose) qui potentialisent les effets du premier. Outre une baisse du poids pouvant être supérieure à celle induite par les autres produits (15 à 20 % du poids initial), le tirzépatide (15 mg une fois par semaine pendant 52 semaines) a réduit dans l’étude SUMMIT de 46 % le risque d’aggravation de l’insuffisance cardiaque chez l’obèse (IMC supérieur ou égal à 30), ainsi qu’amélioré la qualité de vie des patients.
Des bénéfices au-delà de la perte de poids ?
La perte de poids provoquée par les agonistes du GLP-1 est-elle seule responsable de la baisse du risque cardiovasculaire ? Très probablement pas, même si les mécanismes précisément en cause restent encore à préciser.
Pour le Pr Hulot, il conviendrait de chercher du côté d’un effet pléiotrope, autrement dit d’une résultante d’impacts sur une multitude de tissus. Pointant par exemple la mise en évidence dans l’étude SELECT d’une baisse importante (40 %) du taux de la CRP, et donc de l’inflammation circulante liée à l’activité augmentée des adipokines, des cytokines pro-inflammatoires secrétées par le tissu adipeux. Une autre observation allant dans le même sens est représentée par une réduction sous agonistes du GLP-1 du tissu adipeux péricardique, mesurée par IRM, connu pour être un marqueur de mauvais pronostic.
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